La bascule est historique. Pour la première fois, la fibre optique vient de dépasser le câble comme première technologie d’accès au haut débit dans les 38 pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), selon les dernières données de l’institution basée à Paris. Ces précieux fils de verre représentent désormais presque 35 % des abonnements en moyenne dans le bloc, contre 32 % pour le câble et 27 % pour le DSL.
Les courbes se sont croisées après la forte augmentation constatée en 2021. En moyenne, les abonnements à la fibre optique ont augmenté de plus de 18 %, tandis que ceux au câble, eux, ont baissé de 0,5 %. Encore dominant en 2009, le DSL lui a poursuivi son lent déclin entamé en 2014, avec une nouvelle baisse de 7 % l’année dernière.
En France, la bascule avait déjà eu lieu fin 2021. Depuis, l’écart s’est encore creusé. Mais la transition n’avait pas encore eu lieu à l’échelle de l’OCDE. Depuis sa création en 1961, le « club des pays riches » s’est élargi à de nouveaux pays en développement, moins bien connectés.
La France fait mieux que la moyenne OCDE
Or c’est précisément ce qui s’est passé l’année dernière, avec un fort rattrapage dans les Etats moins bien couverts. Par exemple, le Costa Rica, la Grèce, Israël ou la Belgique ont tous connu une croissance des abonnements supérieure à 80 %. Le Royaume-Uni, un pays fibré à seulement 27 % selon le FTTH Council, a eu une croissance de 50 %. La France, couverte aux deux-tiers, a logiquement enregistré une croissance moins spectaculaire des nouveaux clients après le raz-de-marée de 2020 lié aux confinements : +40 %, ce qui la positionne à la 11e place.
Résultat, la part de la fibre dans le haut débit total est désormais égale ou supérieure à 50 % dans 13 pays de l’OCDE. La palme va au Japon et à la Corée du Sud avec plus de 80 %. L’Espagne termine le trio de tête avec 79 %, tandis que deux autres pays européens (Suède et Lituanie) figurent dans le top 5. La France, pour sa part, arrive 15e avec plus de 45 % des abonnements en fibre — ce qui reste quand même supérieur à la moyenne de l’OCDE.
Pour les opérateurs télécoms, cette bascule est de très bon augure. Les « telcos » ont dépensé des milliards pour déployer sous terre ou en aérien ces fils de verre censés remplacer le câble pour des décennies à venir. La fibre optique apporte plus de débit et consomme quatre fois moins d’énergie que le câble.
Mais si l’OCDE se réjouit, c’est aussi qu’il existe une corrélation simple (de 0,54 selon l’institution) entre le nombre d’abonnements au haut débit… et la croissance économique que promeut l’OCDE. La fibre optique augmente l’attractivité des territoires et permet de numériser plus vite les processus dans les entreprises. Cette corrélation joue à plein dans les pays européens : Suisse, France, Norvège, Danemark et Allemagne.
La Grèce en bas du peloton
Pour autant, de fortes inégalités subsistent. Tant au niveau de la couverture que des abonnements, et y compris à l’intérieur même de l’Europe. Ainsi, les pays où la part de la fibre est la plus faible (moins de 10 % des abonnements) sont tous européens : Italie, Allemagne, Royaume-Uni, Autriche, Belgique et la Grèce en tout dernier avec 0,2 % !
S’il est certes plus dur de fibrer un archipel comme la Grèce, ce décalage s’explique aussi par des choix politiques très différents. La France a pris le virage du très haut débit très tôt, avec pour objectif de l’apporter sur 100 % du territoire en 2022, dont 80 % via la fibre. Le pari va être tenu puisque déjà la technologie est présente sur 72 % du territoire selon l’Arcep.
Mais d’autres pays ont continué de miser sur le câble ou sur les réseaux mobiles 4G. L’exemple français est cependant en train de faire des émules. L’Allemagne et le Royaume-Uni mettent des milliards pour passer à la fibre. Des relais de croissance pour la filière tricolore qui espère ainsi créer de nouveaux emplois alors que le chantier entre dans sa dernière ligne droite dans l’Hexagone.