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Crise du papier : les maisons d’éditions constatent une « détente » avant la rentrée littéraire


Ce n’est pas encore un front totalement pacifié, mais depuis quelques semaines, les services de fabrication des maisons d’éditions françaises sont moins sous tension pour ce qui est de leurs commandes de papiers. « La gestion des approvisionnements reste compliquée mais il commence à y avoir des premiers signes de détente », note Fabrice Bakhouche, directeur général délégué d’Hachette Livre, le leader du marché de l’édition en France qui, comme tous ses rivaux, essuie les plâtres de la crise du papier depuis des mois.

« Les délais de livraison du papier se sont légèrement détendus », approuve Pascal Lenoir, responsable production chez Gallimard et président de la commission environnement et fabrication du Syndicat national de l’édition (SNE). « Au plus fort de la crise, ils étaient montés à douze semaines contre quatre habituellement. On tourne actuellement autour de six à huit semaines en fonction du type de papier. »

Plusieurs facteurs expliquent cette relative « détente ». Tous les acteurs du secteur évoquent, en premier lieu, la récente fin des grèves – qui se sont étalées de longs mois durant – chez le finlandais UPM, le numéro un mondial du papier. Autre explication : le réattérissage du marché français de l’édition – qui a baissé de 5 %, sur un an, lors du premier semestre -, après une année 2021 record. « Depuis, nous avons su réorganiser nos capacités productives et nous adapter à la nouvelle donne », expose Fabrice Bakhouche.

Une bouffée d’air alors qu’arrivent 490 romans

Les géants du secteur ne sont pas les seuls. « On a pris le pli de travailler très en amont. Dans le cas où la situation se tendrait de nouveau, on a déjà lancé le processus de pré-planification avec nos imprimeurs de toutes nos BD, mangas et comics prévus pour le début de l’année 2023 », note Flora Pajon, technicienne de fabrication chez Delcourt qui passe par ses partenaires imprimeurs pour ses commandes de papiers – quand les poids lourds du secteur, comme Hachette ou Editis, traitent directement avec les papetiers.

« Avant, on prévoyait ça deux ou trois mois à l’avance seulement. On communique aussi des tirages estimatifs plus hauts qu’avant à nos imprimeurs. Cette crise du papier va profondément et durablement changer les habitudes de fonctionnement de notre industrie », précise-t-elle. En attendant, cette amélioration de la question des approvisionnements est une vraie bouffée d’air pour le secteur alors que se profile la rentrée littéraire avec ses 490 romans en librairie entre mi-août et octobre, selon « Livres Hebdo ».

Très exposée médiatiquement, celle-ci donne le coup d’envoi de la saison des prix d’automne (Goncourt, Renaudot, etc.) faisant, eux, office de tremplin dans une période commerciale cruciale (avec les fêtes de fin d’année) pour le secteur qui réalise autour de 30 % de ses revenus lors du dernier quadrimestre. Mieux vaut donc ne pas être en manque de papier…

Pas de détente sur les prix

« Les craintes ne concernent pas un livre qui gagnerait un prix prestigieux et verrait ses ventes s’accélérer d’un coup. Il y a plusieurs tours avant qu’un Goncourt ou qu’un Renaudot soit discerné, donc on le voit venir et on a le temps de s’organiser, fait valoir Pascal Lenoir. Le scénario catastrophe peut avoir lieu avec un livre que vous avez tiré à 3.000 exemplaires et qui devient un succès avec le bouche-à-oreille, ce qui est imprévisible. Si l’absence de ce livre en librairie dure, ça ne se rattrape pas. »

Reste que ce desserrement des délais sur l’approvisionnement du papier ne s’accompagne pas d’une correction sur les prix qui ont bondi, sur deux ans, de 20 % à plus de 50 %, en fonction de la nature du papier commandé par les maisons d’édition. « La hausse du prix du papier, qui est de l’ordre de 25-30 % pour Hachette, a eu un impact de plusieurs millions d’euros sur notre résultat opérationnel lors du premier semestre, met en exergue Fabrice Bakhouche. Cette situation devrait perdurer au second semestre. » Sans compter que les hausses des prix de l’énergie et ou des transports viennent aussi grever la rentabilité des acteurs du secteur. La fin des tensions n’est pas pour demain dans l’édition.

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