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Une exoplanète océan à 100 années-lumière du Soleil ?



On se souvient de l’événement qu’a représenté la première photo d’un système exoplanétaire en 2008. Il s’agissait de l’imagerie des exoplanètes en mouvement autour de l’étoile HR 8799 prise par les astronomes québécois René Doyon, David Lafrenière et Christian Marois. Aujourd’hui, c’est Charles Cadieux, un doctorant de l’Université de Montréal, membre de l’Institut de recherche sur les exoplanètes (iREx) qui fait parler de lui avec l’équipe internationale qu’il a dirigée et qui publie aujourd’hui un article dans la célèbre revue Astronomical Journal.

Il y est question d’une découverte remarquable comme on peut s’en rendre compte en lisant l’article en accès libre sur arXiv et elle fera sans doute plaisir aux lecteurs de l’Incal, la célèbre bande dessinée de science-fiction française scénarisée par Alexandro Jodorowsky et dessinée par Mœbius. Ils ne manqueront pas de penser à la planète prison d’Aquaend puisque les astronomes font aujourd’hui état de la découverte à seulement 100 années-lumière de la Terre de ce qui semble bien être une planète océan.

Représentation de l’exoplanète TOI-1452 b, une petite planète potentiellement recouverte d’eau révélée par une équipe internationale de chercheurs dirigée par Charles Cadieux, doctorant à l’Université de Montréal et membre de l’Institut de recherche sur les exoplanètes (IRex). © Benoît Gougeon, Université de Montréal

L’astre prétendant à ce titre s’appelle TOI-1452 b et, comme son nom le laisse deviner (Tess Object of Interest TOI), il a été initialement débusqué par le satellite Tess de la Nasa en utilisant la méthode de transit. Cette méthode fournit un rayon et une période orbitale pour une exoplanète. On peut la compléter en déterminant une masse à l’aide de la méthode des vitesses radiales. Masses et rayons donnant une densité, on peut alors avancer qu’une exoplanète est ou n’est pas une planète océan si en plus elle se trouve à une distance de son étoile hôte rendant en théorie possible l’existence d’eau liquide — cela ne va pas de soi car il faut aussi prendre en compte l’existence d’une atmosphère et d’un possible effet de serre.

TOI-1452 b se trouve dans la constellation du Dragon mais avant de conclure qu’il s’agissait peut-être d’une planète océan, il a fallu vérifier déjà qu’elle existait en orbite autour d’une des petites étoiles d’un système binaire observé par Tess, avec une taille environ 70 % plus grande que la Terre et une période orbitale autour d’une naine rouge de seulement onze jours.

L’Observatoire du Mont-Mégantic est une installation de recherche astronomique de calibre mondial situé dans la première Réserve internationale de ciel étoilé. Vous pourrez bientôt le visiter virtuellement assis confortablement depuis votre divan. En voici un avant-goût ! © Emir Chouchane, Université de Montréal

Des transits et des décalages Doppler

Charles Cadieux et ses collègues ont tout d’abord confirmé l’occurrence de transit avec la caméra Pesto (pour Planètes Extra-Solaires en Transit et Occultations) conçue par David Lafrenière et son étudiant de doctorat François-René Lachapelle, tout deux de l’Université de Montréal. Elle est installée sur le télescope de l’Observatoire du Mont-Mégantic, situé en Estrie.

Restait à déterminer la masse et c’est ce qui a été rendu possible avec le spectropolarimètre infrarouge (SPIRou), un instrument développé en partenariat notamment par l’Université de Montréal et des chercheurs de l’Institut de Recherches en Astrophysique et Planétologie de Toulouse. Ce spectrographe, installé à Hawaii sur le télescope Canada-France-Hawaii, permet des mesures de vitesse radiale dans l’infrarouge par effet Doppler sur les étoiles de faible masse avec une précision suffisante pour détecter des planètes de la taille de la Terre dans la zone habitabilité.

« L’exoplanète TOI-1452 b est l’une des meilleures candidates au titre de “planète océan” que l’on connaisse. Le rayon et la masse de la planète laissent supposer une densité plus faible que la valeur attendue pour une planète qui, à l’instar de la Terre, serait essentiellement formée de métaux et de roche », explique en conséquence Charles Cadieux dans un communiqué de l’iREx.

Les méthodes de détection des exoplanètes se sont largement diversifiées depuis les années 1990. Elles peuvent se classer en deux grandes catégories, les méthodes directes et les méthodes indirectes. Les trois méthodes principales sont la méthode directe d’imagerie, la méthode indirecte du transit et la méthode indirecte de la vitesse radiale. Partez à la découverte des exoplanètes à travers notre websérie en 9 épisodes. Une vidéo à retrouver chaque semaine sur notre chaîne Youtube. Une playlist proposée par le CEA et l’Université Paris-Saclay dans le cadre du projet de recherche européen H2020 Exoplanets-A. © CEA Recherche

Une atmosphère et un océan à étudier avec le JWST ?

« Je suis extrêmement fier de cette découverte parce qu’elle met en valeur la qualité des astronomes et des instruments d’ici. Sans l’Observatoire du Mont-Mégantic, l’instrument SPIRou conçu dans nos laboratoires et une méthode d’analyse innovante élaborée par notre personnel de recherche, nous n’aurions pas pu mettre au jour cette exoplanète unique en son genre », explique toujours dans le même communiqué de son côté René Doyon, professeur à l’Université de Montréal et directeur de l’iREx et de l’Observatoire du Mont-Mégantic (OMM). 

René Doyon étant aussi le chercheur principal de NIRISS, l’un des quatre instruments scientifiques du télescope spatial James-Webb (JWST), il y ajoute que « des observations avec Webb seront essentielles pour mieux déterminer plus précisément la nature de TOI-1452 b. Dès que nous le pourrons, nous allons solliciter du temps pour observer cette planète étrange ».

À cet égard, il est intéressant de savoir que, selon Mykhaylo Plotnykov et Diana Valencia, de l’Université de Toronto, deux spécialistes des modèles de structure interne d’exoplanètes, la fraction de la masse en eau de TOI-1452 b pourrait atteindre les 30 %, ce que l’on observe déjà avec certaines des lunes de Jupiter et Saturne, comme Ganymède et Encelade.

C’est de bon augure pour l’exobiologie car, avec une distance de seulement 100 années-lumière du Système solaire, l’exoplanète est en quelque sorte à portée de main des instruments du JWST capables de caractériser son atmosphère.

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