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échec des négociations à l’ONU


Baleine à la surface de l’eau, dans l’Atlantique Nord, en 2018.

Encore raté. Après deux semaines de négociations, les Etats membres des Nations unies (ONU) se sont séparés, vendredi 26 août, sans réussir à finaliser le traité pour protéger la haute mer, plusieurs contentieux majeurs restant à dépasser pour parvenir à un accord crucial pour l’océan, trésor fragile et vital pour l’humanité.

Après plus de quinze années de discussions informelles puis formelles pour accoucher d’un texte contraignant, visant à sauvegarder cette vaste zone qui couvre près de la moitié de la planète, cette cinquième session devait être la dernière – comme devait déjà l’être la quatrième, en mars. Malgré des discussions qui ont débordé dans la soirée de vendredi, cela n’a pas suffi. « Nous n’avons jamais été aussi proches de la ligne d’arrivée dans ce processus », a toutefois relevé la présidente de la conférence, la Singapourienne Rena Lee.

« Même si nous avons fait d’excellents progrès, nous avons encore besoin d’un peu de temps pour aboutir », a-t-elle ajouté, recueillant l’approbation de la plénière pour suspendre les travaux sine die. L’Assemblée générale de l’ONU va désormais être saisie d’une demande de reprise de cette cinquième session à une date qui reste à déterminer.

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Absence d’accord sur l’exploitation des ressources génétiques

« Malgré la déception de ne pas avoir finalisé le traité pendant ces deux semaines, nous jugeons encourageants les progrès réalisés », a commenté Liz Karan, de l’ONG The Pew Charitable Trusts, appelant à une nouvelle session d’ici à la fin de l’année.

Greenpeace s’est montré plus sévère, accusant notamment les Etats-Unis et les pays de la Coalition pour une haute ambition, emmenés par l’Union européenne (UE), d’avoir attendu le dernier moment pour faire preuve de cette ambition « autoproclamée ». Trop tard : « Le temps est écoulé », a dénoncé Laura Meller, responsable Océans de l’ONG. « Pendant que les pays continuent à parler, les océans et ceux qui en dépendent souffrent », a-t-elle ajouté dans un communiqué.

Par exemple, les Etats insulaires en développement du Pacifique. En leur nom, la représentante de Samoa, très émue, a exprimé sa « déception ». « Nous vivons très loin et cela coûte cher de venir jusqu’ici. (…) De l’argent qui n’est pas dépensé pour des routes, des médicaments, des écoles ». « Le Pacifique est venu ici en toute bonne foi et continuera à le faire jusqu’à ce que nous concluons cette conférence dans un avenir proche », a-t-elle lancé au bord des larmes, sous les applaudissements de la salle.

Parmi les sujets les plus sensibles dans ces négociations, la répartition des possibles bénéfices issus de l’exploitation des ressources génétiques de la haute mer, où industries pharmaceutiques, chimiques et cosmétiques espèrent découvrir des molécules miraculeuses.

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Répondant aux demandes des pays en développement qui craignent de passer à côté de retombées potentielles faute de pouvoir conduire ces recherches coûteuses, le dernier projet de texte laissait sur la table, mais sans accord, la redistribution initiale de 2 % – et à terme jusqu’à 8 % – des futures ventes de produits issus de ces ressources qui n’appartiennent à personne.

« Occasion ratée »

Greenpeace avait d’ailleurs accusé, jeudi, l’UE, les Etats-Unis et le Canada de précipiter ces négociations vers un échec en raison de leur « avidité » à garder ces ressources pour eux. Des accusations rejetées par un négociateur européen.

Ces questions d’équité entre le Nord et le Sud traversent de nombreuses négociations internationales, en particulier celles sur le climat où les pays en développement victimes mais pas responsables du réchauffement réclament en vain aux pays riches de respecter leurs promesses d’aide financière.

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Ce traité vise spécifiquement la haute mer, qui commence où s’arrêtent les zones économiques exclusives (ZEE) des Etats, à un maximum de 200 milles nautiques (370 kilomètres) des côtes, et qui n’est donc sous la juridiction d’aucun pays. Alors que la bonne santé des écosystèmes marins est cruciale pour l’avenir de l’humanité, notamment pour limiter le réchauffement de la planète, seulement 1 % de cet espace, qui représente 60 % des océans, est protégé.

Un des piliers du traité sur « la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale » est d’ailleurs d’y permettre la création d’aires marines protégées. « Une étape cruciale dans les efforts pour protéger au moins 30 % de la planète d’ici à 2030 », avait souligné cette semaine Maxine Burkett, une responsable pour les océans au département d’Etat américain.

Certains experts craignent que si le traité sur la haute mer n’est pas conclu d’ici à la fin de l’année, cet objectif soit hors d’atteinte. Les délégations s’opposent toujours sur le processus de création de ces aires protégées, ainsi que sur les modalités d’application de l’obligation d’études d’impact environnementales avant une nouvelle activité en haute mer. « Quelle occasion ratée… », a regretté sur Twitter Klaudija Cremers, chercheuse à l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri) qui, comme plusieurs ONG, a un siège d’observateur des négociations.

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Le Monde avec AFP

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