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Déjà une centaine d’expérimentations de l’intelligence artificielle au sein de l’Etat


La puissance publique commence à apprivoiser les techniques d’intelligence artificielle. C’est ce que montre un rapport de 360 pages, rédigé par le Conseil d’Etat, présenté mardi 30 août à la presse et remis à la Première ministre avant la coupure estivale. « Les usagers ne le savent pas toujours mais il n’existe pas un domaine de l’action publique où l’intelligence artificielle (IA) n’est pas utilisée », assure Alexandre Lallet, l’un des deux rapporteurs.

Bien loin de se limiter aux très médiatiques essais de reconnaissance faciale sur la voie publique ou au contrôle de l’impôt sur les piscines grâce à des photos satellites, l’Etat et les collectivités ont déjà embrassé bien des cas d’usage des algorithmes auto-apprenants.

Par exemple, les pompiers du Doubs anticipent avec jusqu’à trois jours d’avance le niveau de sollicitation de leurs équipes, en fonction de données météorologiques, du trafic routier, du niveau des cours d’eau et même des éphémérides. Si besoin, les pompiers volontaires sont mobilisés. Pour lutter contre les incendies et la sécheresse, la région Occitanie simule l’évolution du niveau des nappes phréatiques.

Une centaine d’expérimentations malgré les peurs

Très souvent, ces systèmes se limitent à de l’aide à la décision et mâchent une partie du travail d’un agent. Au ministère de la Justice, la cour de Cassation élabore un logiciel permettant de « pseudonymiser » automatiquement les décisions de justice rendues publiques. A l’Intérieur, le délai de délivrance des cartes grises est réduit à quelques heures grâce à l’intelligence artificielle. Devenus très courants, les robots conversationnels – les fameux logiciels chatbots – répondent 24 heures sur 24 et sept jours sur sept aux questions les plus simples des usagers de la caisse nationale d’assurance-vieillesse ou, pendant l’épidémie de Covid-19, de l’Urssaf.

Mais tous ces exemples – dans une annexe non exhaustive, le Conseil d’Etat en a répertorié une centaine – ne sont pour la plupart que des expérimentations. Souvent, les services de l’Etat manquent de données et de personnels qualifiés. Les agents et l’opinion publique s’avèrent aussi parfois peu allants, échaudés par la peur de voir l’IA détruire des emplois et instaurer une société de contrôle.

Règlement européen en vue

La plus haute juridiction de la justice administrative encourage le gouvernement à aller plus loin. Pour le guider, elle a fixé sept principes pour une « IA publique de confiance ».

Alors qu’il pourrait être saisi en dernier recours en cas de litige entre un justiciable et l’Etat à propos de ces systèmes innovants, le Conseil d’Etat appelle aussi le gouvernement à s’aligner d’ores et déjà sur les grands principes connus du futur règlement européen sur l’intelligence artificielle (garantie de transparence, exigence renforcée et contrôle humain pour les IA « à haut risque »). Sans surprise, le Conseil d’Etat recommande aux gouvernements de confier le rôle de régulateur sur ces sujets à la CNIL.

Equilibrer entre le contrôle et les services

« Quand les pouvoirs publics déploient des intelligences artificielles, il faut veiller à maintenir un équilibre entre les IA dont l’objet est de contrôler et celles dont l’objet est de rendre service. C’est essentiel pour que les agents et les usagers aient confiance », alerte Thalia Breton, également rapporteure de l’étude.

Le Conseil d’Etat ne le dit pas mais les systèmes d’IA qui aujourd’hui sont les plus avancées au sein de l’Etat sont des projets de contrôle, assure un bon connaisseur. Or, l’IA appliquée à la vidéosurveillance peut aussi bien tenter de repérer un terroriste dans une foule qu’un enfant perdu. L’intelligence artificielle peut aider les contrôleurs du fisc à lever l’impôt comme elle peut aider un conseiller des services sociaux à réaliser qu’un allocataire ne bénéficie pas de toutes les aides auxquelles il a droit.

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