Dix ans après sa création compliquée, où chaque équilibre entre utilisateurs historiques du massif – randonneurs, cabanoniers, chasseurs, grimpeurs… – et volonté de préserver l’environnement a été longuement soupesé et négocié, le parc national des Calanques (PNC) jongle encore avec ses paradoxes de naissance. La question de la chasse, autorisée sur son aire protégée par le législateur, n’est pas le moindre. Elle reste possible sur 48 % de ses 8 500 hectares terrestres, et a été rouverte, comme chaque année, à la mi-septembre.
Mais la liste des animaux chassables dans le parc marseillais, validée pour un an par son conseil d’administration début juillet, fait aujourd’hui débat. En cause, notamment, la présence de trois espèces classées « menacées » ou « quasi menacées » selon l’inventaire national du patrimoine naturel (INPN) : le lapin de garenne, la perdrix rouge et surtout la grive mauvis, un passereau qui migre par les calanques d’octobre à novembre et dont l’INPN assure qu’il est « proche du seuil des espèces menacées si des mesures spécifiques de protection ne sont pas prises ». Ces trois espèces figurent également dans la « liste rouge » de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), dont le dernier congrès, en septembre 2021, s’est justement tenu à Marseille, en présence d’Emmanuel Macron.
« Dix années de perdues »
Le 5 juillet, le vote sur le règlement de chasse 2022-2023 du parc national des Calanques n’a pas été unanime. Une rareté au sein d’une structure qui met en avant sa « culture de consensus ». Cinq administrateurs sur trente et un s’y sont opposés et six autres se sont abstenus, dont la ville de Marseille et l’Office français de la biodiversité. L’élu municipal Hervé Menchon (Europe Ecologie-Les Verts), adjoint au maire chargé du littoral, a exigé le retrait des trois espèces menacées de la liste des animaux chassables. « Une demande urgente, surtout après l’été de sécheresse que nous venons de vivre », insiste-t-il aujourd’hui.
Quant au représentant de la Ligue de protection des oiseaux (LPO), il a regretté « dix années de perdues » et s’est étonné que « dans l’un des sanctuaires de la protection de la nature, la faune sauvage n’est pas préservée ». « C’est un scandale que l’on puisse chasser des espèces en mauvais état de conservation sur un tel site. Cela dégrade l’image même des parcs nationaux censés être le fleuron de la politique de protection de l’environnement, s’agace aujourd’hui le directeur général de la LPO, Yves Vérilhac. Emmanuel Macron a fait l’an dernier à Marseille un discours sur l’importance de la défense de la biodiversité et on assiste ici à l’inverse de ce qu’il promettait… »
Il vous reste 56.35% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.