Le message est clair comme de l’eau de roche. « On ne veut pas de ce forage ici. Nous, on veut de l’eau », assène, sous le couvert de l’anonymat, Jessica, éleveuse de brebis à Nages, un village tarnais implanté au cœur des Monts de Lacaune, ce petit massif montagneux au cœur du parc naturel régional du Haut-Languedoc. Malgré ses efforts, elle ne parvient pas à contenir sa colère : « On vient de passer un été pourri. On attend encore que l’eau tombe du ciel. Il faut arrêter de piquer l’eau du voisin pour se faire de l’argent, on peut tous vivre en bonne harmonie sans se marcher dessus. »
Comme elle, de nombreux habitants et agriculteurs du secteur craignent les menaces que fait peser, selon eux, un projet de Danone sur l’approvisionnement en eau potable. La Société anonyme des eaux minérales d’Evian (Saeme), propriété de Danone, qui exploite et commercialise l’eau de la source La Salvetat sur la commune de La Salvetat-sur-Agout, dans l’Hérault, envisage d’étendre la zone de captage en eau minérale naturelle pour son usine d’embouteillage au-delà du périmètre actuel de 80 km2, sur lequel sont répartis dix forages en activité.
Depuis mars, l’industriel dirige, en lien avec le Bureau de recherches géologiques et minières, un forage de reconnaissance de la nappe souterraine alimentant la source Narulle qui chemine dans les terres d’un agriculteur domicilié à La Baraque des Fournials, un lieu-dit situé à Murat-sur-Vèbre, à une vingtaine de kilomètres de La Salvetat.
Pétition en ligne
Sous quarante mètres de gneiss, cette roche métamorphique spécifique à ce massif, « quelques litres » d’eau sont pompés dans l’aquifère pour étudier ses caractéristiques qui pourraient être proches de celles de La Salvetat. La stabilité de sa composition en minéraux, dont une faible teneur de sodium, et l’absence de contamination microbiologique sont étudiées à la loupe.
Interrogé, Danone précise sa démarche. « Le cœur de notre métier est de faire des forages qui nous permettent de réaliser un sondage, une échographie, du sous-sol, explique Cathy Le Hec, directrice ressources en eaux et environnement pour Danone Waters France. Pour chercher à confirmer des signaux précurseurs identifiés, nous effectuons des prélèvements en continu pour constater la signature minérale de cette eau afin de mettre en place un diagnostic complet sur une durée suffisamment longue qui couvre un cycle hydrologique. Si tel est le cas, cela peut nous donner des opportunités de développement pour notre activité. »
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