La majorité des grandes éruptions volcaniques sur Mars se sont produites il y a entre 3 et 4 milliards d’années, avec de plus petites éruptions dans des endroits isolés il y a sans doute 3 millions d’années. Mais on dispose maintenant d’éléments laissant penser que Mars pourrait encore être volcaniquement active, avec du magma prêt à faire surface.
Fin octobre 2022, la Nasa avait fait monter la tension dans le monde de la planétologie en annonçant une découverte importante faite en conjuguant les observations de la sonde Mars Reconnaissance Orbiter (MRO) avec les mesures du sismomètre de la mission InSight à la surface de la Planète rouge. On pouvait en tirer la conclusion qu’un événement aux conséquences visibles par MRO avait été accompagné d’un séisme martien, mais de quelle nature était-il ?
On pouvait imaginer l’impact d’un petit corps céleste ayant causé des ondes sismiques permettant de le localiser puis de comparer des images de MRO avant et après l’occurrence du phénomène, révélant alors sans doute l’existence d’un cratère.
Plus fascinant encore et avec des conséquences bien plus grandes, une éruption volcanique aurait peut-être pu se produire également. Mars est couverte de preuves d’activités éruptives massives il y a des milliards d’années et les rovers martiens en ont même donné des preuves directes. On s’en doutait déjà depuis au moins les analyses des sols martiens fournies par les sondes Viking au cours des années 1970, qui montraient que ces sols avaient toutes les caractéristiques de ce qui sur Terre aurait été le produit de l’altération de roches basaltiques.
Il existe des indications de récentes éruptions volcaniques sur Mars mais il y a quelques millions d’années au mieux et plutôt il y a quelques dizaines de millions d’années (il y a toutefois une exception), de plus elles sont rares, ou du moins semblent comme tel. Hélas, InSight et MRO ont bien détecté un impact de météorite, creusant tout de même un cratère d’environ 150 mètres de diamètre.
Des ondes sismiques révélatrices de circulations de magma ?
Toutefois, on prend connaissance avec attention d’une récente publication dans le célèbre journal Nature Astronomy. On la doit à une équipe internationale menée par des chercheurs de l’ETH à Zurich avec leurs collègues de l’université de Nantes et du CNRS à Paris notamment.
On sait que depuis quelque temps déjà de nombreux et relativement puissants signaux sismiques ont été détectés semblant provenir d’une source associée à Cerberus Fossae (les fosses de Cerbère), un immense système de failles volcaniques situé à environ 1 600 kilomètres d’InSight et que l’on sait avoir été géologiquement actif au cours des quelques dizaines de derniers millions d’années.
Les fosses de Cerbère apparaissent comme des canyons de plusieurs centaines de kilomètres de long de jusqu’à un kilomètre de large et un kilomètre de profondeur.
Les nouvelles analyses des données d’InSight donnent maintenant un peu plus de poids à une hypothèse déjà avancée depuis quelque temps. Les séismes enregistrés ne seraient pas la manifestation du refroidissement toujours en cours de Mars qui comme dans le cas de la Lune la fait se contracter.
Pour comprendre de quoi il en retourne il faut savoir que tout comme sur Terre, les mécanismes au foyer des séismes à leur origine laissent des traces dans les ondes sismiques qui sont particulières et qui permettent d’avancer des hypothèses sur la dynamique planétaire en cours. Plus généralement, la forme de ces ondes renseigne aussi sur l’état des roches dans la région entourant leur source, par exemple si elles sont plus chaudes ou plus « molles » et partiellement ou non en fusion.
Dans le cas des fosses de Cerbère, il semble donc de plus en plus crédible que des ondes sismiques y sont en connexion avec des circulations de magma à des profondeurs comprises entre 30 et 50 kilomètres seulement. C’est donc tout à fait similaire à ce qui se passe sous certains édifices volcaniques actifs sur notre Planète bleue et cela pourrait donc signifier qu’il n’est pas irréaliste d’espérer voir un jour MRO, ou ses successeurs, surprendre dans un avenir pas trop lointain une éruption dans la région de Cerberus Fossae.
Si tel est bien le cas, on peut penser également que d’autres régions volcaniques sont bel et bien encore chauffées par du magma proche, entretenant des poches d’eau liquides où des formes de vie proliféreraient encore.