« Il est virtuellement certain que le niveau moyen des océans va continuer à augmenter au cours du XXIe siècle », assure le sixième rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), publié en 2021. « Virtuellement certain », cela signifie que les scientifiques du GIEC estiment qu’il y a plus de 99 % de chances que cette prévision se réalise. Au cours du dernier siècle, le niveau moyen de la mer a déjà augmenté d’une vingtaine de centimètres. En 2050, ce seraient 15 centimètres de plus, dans le scénario intermédiaire du GIEC où la température moyenne à la surface du globe aurait augmenté de 2 degrés par rapport à l’ère préindustrielle.
Ce type d’assertions repose sur un travail scientifique d’une ampleur titanesque. La prévision de l’augmentation du niveau de la mer « c’est un des plus beaux défis scientifiques contemporains », s’exclame Benoit Meyssignac, océanographe au laboratoire Legos, à Toulouse. « Et cela a un intérêt sociétal énorme. C’est sans doute l’un des rares sujets dont l’impact concret est directement en lien avec le vertige que peut donner la science. » Car derrière cette montée des eaux se cachent de nombreux facteurs qui s’entremêlent, des effets d’échelle, des défis techniques ou encore des difficultés théoriques. « Pour modéliser le climat, il faut un modèle de l’océan, un modèle de l’atmosphère, un modèle pour l’hydrologie… Et tous ces modèles interagissent les uns avec les autres », explique Mélanie Becker, chercheuse en géophysique au laboratoire Liens et directrice de recherche au CNRS.
Concrètement, pour établir ces prévisions, les scientifiques s’appuient sur des observations pour identifier comment le niveau de la mer a évolué par le passé, et comment il évolue aujourd’hui. Ils cherchent ensuite à comprendre les causes de ces changements en proposant des modèles théoriques fondés sur des équations physiques connues. En comparant les résultats fournis par leurs modèles aux observations faites par le passé, ils confirment ou infirment leurs hypothèses et affinent les paramètres. Ce sont ensuite ces modèles, capables de reproduire les données du passé, qui sont utilisés pour prévoir l’avenir en fonction des différents scénarios de réchauffement de la planète.
Accélération de la fonte des glaces
A l’échelle globale, les principaux processus qui influencent le niveau moyen des océans sont aujourd’hui bien connus. D’abord, sous l’effet du réchauffement climatique, l’océan se dilate. « Les émissions de gaz à effet de serre limitent le rayonnement infrarouge de la Terre vers l’espace, explique Benoit Meyssignac. Par conséquent, la Terre et son atmosphère reçoivent plus d’énergie qu’elles n’en émettent. Or, ce surplus énergétique est stocké à plus de 90 % dans l’océan, car l’eau a une capacité calorifique [capacité à absorber l’énergie] beaucoup plus importante que l’air. » Conséquence : l’océan se réchauffe, et son immense volume d’eau se dilate.
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