La série d’incidents autour de la centrale nucléaire de Zaporijia ressemble fâcheusement à la chronique d’une catastrophe annoncée. L’environnement sécuritaire autour des six réacteurs s’est fortement dégradé, jeudi 25 août, après qu’un incendie a entraîné une coupure automatique pendant plusieurs heures de la liaison entre le site situé au sud de l’Ukraine, le long du Dniepr, et le réseau électrique. Ce qui n’était jamais arrivé à la plus grande centrale d’Europe depuis son entrée en service en 1985.
Les trois lignes aériennes à haute tension de 750 kilowatts (kW) qui partent en direction du Nord – contrôlé par le gouvernement ukrainien – ont été endommagées par l’incendie. Seule la ligne de sécurité de 330 kW qui va vers le Sud – zone occupée par les troupes de Moscou – n’a pas été déconnectée, mais sa puissance est insuffisante pour assurer un fonctionnement sécurisé de l’infrastructure.
Pour être refroidis, les six réacteurs à eau pressurisée ont besoin du fonctionnement d’autant de pompes. Depuis la prise d’assaut de la centrale par l’armée russe, le 4 mars, seuls deux réacteurs continuent de produire de l’énergie. Jeudi, des générateurs diesel de secours ont permis d’éviter la surchauffe et la connexion a été rétablie en début de soirée. Aucune fuite radioactive n’a pour l’instant été détectée dans les alentours.
La cause de l’important incendie qui s’est déclaré sur le flanc sud de la centrale reste sujette à controverse. Visible sur des clichés satellites publiés en milieu de journée, le foyer principal du sinistre n’est qu’à 1,6 km du réacteur numéro 6 et à tout juste 500 mètres de la sous-station électrique, qui convertit l’électricité produite par les turbines en courant transportable sur le réseau. Comme dans la plupart des incidents de ce type, les deux camps se sont mutuellement accusés d’avoir bombardé le site.
Moscou veut confisquer l’énergie produite
La veille de l’incident, Petro Kotin, le président d’EnergoAtom, la société d’Etat ukrainienne opérant les centrales nucléaires du pays, indiquait au quotidien britannique The Guardian que des ingénieurs russes avaient élaboré un plan pour débrancher complètement le site du réseau ukrainien en cas de dommages sur les lignes causés par les combats. En dépit du risque encouru pour le système de refroidissement des réacteurs. EnergoAtom avait immédiatement eu vent de ce projet parce que ce sont toujours ses employés qui opèrent la centrale, sous la supervision de militaires et d’ingénieurs russes. Ce que Petro Kotin prévoyait, à savoir que l’armée russe cible les lignes électriques vers l’Ukraine, s’est réalisé le lendemain.
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