Cette semaine, le lobby de l’industrie forestière est monté aux barricades pour dénoncer les recommandations de la Commission indépendante sur les caribous forestiers. Il s’oppose à des mesures de protection qui pourraient réduire certains droits de coupe.
Le temps est venu de distinguer l’intérêt du Conseil de l’industrie forestière du Québec (CIFQ) de l’intérêt des communautés qui dépendent des forêts. Le profit à court terme basé sur la surexploitation d’une ressource ne garantit pas des emplois. Au contraire.
Pas de travail forestier sans forêt
Nous sommes en 2022. On sait aujourd’hui que la protection des emplois à moyen et long terme dépend de la préservation de l’environnement, trop souvent qualifié de « ressource ». Même si c’est infiniment plus que cela !
Les pratiques forestières ont beau s’être améliorées depuis 20 ans, les arbres ne poussent pas aussi vite qu’on les coupe. Les écosystèmes forestiers n’ont pas le temps de se régénérer. Sans parler des nouveaux stress qu’ils subissent à cause de la crise climatique.
Le caribou est un peu comme le canari dans la mine. Sa mort indique un problème qui exige une action immédiate.
C’est la métaphore qu’utilisent les Mères au front du Saguenay, mais aussi le Syndicat des Métallos qui représente plus de 2500 employés de l’industrie du bois, principalement autour de Chibougamau, Chapais et dans la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean. Ils récoltent du bois et sont à l’emploi de scieries et d’usine de transformation.
Savoir innover
Pour Dominic Lemieux, directeur québécois du Syndicat des Métallos (FTQ) : « Il faut miser sur une deuxième et troisième transformation pour créer plus d’emplois et générer plus de profits avec moins de bois. » La valorisation de résidus forestiers est une autre piste. Les pratiques de l’entreprise Chantiers Chibougamau sont souvent citées en exemple.
Pour créer des emplois et préserver nos forêts, on aurait aussi intérêt à valoriser les matériaux de construction qui sont jetés, alors qu’ils pourraient être réutilisés. Chaque année, des tonnes de bois aboutissent dans les sites d’enfouissement.
Innover, c’est aussi repenser notre rapport aux matériaux tout au long de leur cycle de vie.
Urgence d’agir
Chose certaine, si on veut espérer sauver le caribou, il faut agir maintenant en préservant son habitat. On ne peut pas attendre jusqu’à juin 2023 pour une stratégie, comme le stipule l’entente de principe survenue cette semaine entre Québec et Ottawa. Un vrai dialogue avec les communautés autochtones est aussi nécessaire.
Le gouvernement du Québec devrait immédiatement mettre en place un moratoire pour interdire les coupes forestières sur les trois sites prioritaires de l’habitat des caribous qui totalisent environ 35 000 km2. Il s’agirait d’une première étape pour ensuite en faire des aires protégées. À noter que cela ne représente que 15 % des 240 000 km2 de notre territoire forestier.
Le gouvernement fédéral est prêt à financer. Actuellement, le Québec laisse sur la table plusieurs centaines de millions de dollars qui pourraient servir à créer de nouvelles aires protégées. Et c’est sans parler des milliards disponibles pour les entreprises en innovation qui veulent améliorer leurs pratiques.
Alors qu’en décembre, le Québec accueillera la planète entière pour la Conférence de l’ONU sur la biodiversité, donnerons-nous l’exemple en laissant mourir nos caribous ? L’emblème de nos 25 sous.