FRANCE 5 – LUNDI 19 SEPTEMBRE À 21 H 00 – DOCUMENTAIRE
Chaque consommateur de vin peut le constater à l’étal de son caviste ou de son supermarché : son nectar préféré est de plus en plus alcoolisé. A partir de ce ressenti, Hugo Clément a mené l’enquête en France, en Espagne, en Belgique et aux Etats-Unis pour inventorier les actions parfois fantasques menées par les vignerons pour tenter d’enrayer cette évolution. Il en rapporte un « Sur le front » édifiant, au cœur d’un mois de septembre traditionnellement consacré aux vendanges et aux foires aux vins. Une bonne cuvée, sans âpreté et porteuse de solutions, dont on appréciera l’humour et la distance.
A condition d’être patient. L’introduction en forme de résumé dure en effet dix bonnes minutes, avant que le journaliste ne confirme par l’exemple notre ressenti. Dans un domaine de la vallée du Rhône, le côte-rôtie 2019 affiche ainsi 14,5 degrés d’alcool, contre 14 degrés en 2017 et 12,5 degrés en 1995. Cette évolution est imputable à la hausse des températures due au dérèglement climatique. Mais pas uniquement. Dès lors, les sujets s’enchaînent, tous instructifs à des titres divers.
Dans la catégorie « aux frontières de la légalité », Hugo Clément révèle notamment que l’indication du taux d’alcool sur les étiquettes autorise une approximation de 0,5 degré ; et qu’ajouter de l’eau dans son vin est une solution simple pour l’alléger.
Plus élaborées, des actions industrielles et chimiques réduisent le taux de sucre responsable du taux d’alcool. Nombre de téléspectateurs vont ainsi découvrir comment fonctionne une machine à désalcooliser le vin ; ou encore que l’ajout de levures naturelles (une pâte marron diluée) est pratiqué légalement en France depuis six ans. Un peu plus tard, ils seront tout aussi surpris d’apprendre que les ceps de merlot sont clonés, d’où leur fragilité à la chaleur.
Réchauffement climatique
Autre piste, atténuer la sécheresse en irriguant. C’est comme cela, entre autres, qu’« à Narbonne-Plage, quand on tire sa chasse d’eau, on irrigue les vignes », lance Hugo Clément, mi-figue mi-raisin. S’ensuit une séquence contre-intuitive sur le réchauffement climatique qui provoque le gel des bourgeons lors des premières gelées, et les moyens (connus) de l’éviter : chauffage électrique, bougies, arrosage, bâches et même hélicoptère pour ventiler l’air froid.
Les exemples les plus extrêmes proviennent de la Napa Valley, grand terroir de Californie, où les incendies ont traumatisé les propriétaires de vignes : brumisateurs, poudre solaire… « Une hérésie », ne peut s’empêcher de dire Hugo Clément. Ce dernier se fait en revanche bienveillant à l’égard de Randy, 76 ans, malgré les paradoxes de cet homme « qui aime autant les moteurs polluants que le terroir authentique ». Doux euphémisme pour celui qui conduit indifféremment son avion de tourisme, son quad, son camion de pompier de 1946 (son année de naissance) et envisage de louer un hélicoptère de combat bombardier d’eau, qui brûle tout de même 750 litres de carburant en trente minutes !
Le retour en France n’en paraît que plus doux, à la découverte – enfin – de solutions naturelles et d’avenir. Il offre surtout l’occasion de rencontrer un pépiniériste sensationnel, qui remet au goût du jour des cépages anciens et résistants. Exit le merlot cloné ? Les vignes de demain pourraient se décliner en cinsault, terret noir ou autre carignan.
Alerte rouge sur le vin, documentaire réalisé par Guillaume Dumant et présenté par Hugo Clément dans le cadre de l’émission « Sur le front » (Fr., 2022, 52 min).