Dans le monde, la fraude est massive et se chiffre en millions de tonnes. Entre 11 % et 19 % des poissons sont pêchés sans être déclarés, sans licence, sans respect de tailles minimum ou de quotas, hors saison, avec des engins prohibés ou bien dans des zones interdites, bref en dehors de toute régulation.
L’Union européenne (UE) s’était engagée à éliminer ces produits de la mer illicites de ses marchés à l’horizon 2 020. « Or elle n’y est pas parvenue », constate la Cour des comptes européenne dans un rapport publié lundi 26 septembre, qui conclut : « Les Etats membres doivent frapper plus fort ».
La pêche illicite, non déclarée et non réglementée (pêche INN) constitue « l’une des plus graves menaces pesant sur les écosystèmes marins », affirme la Cour, basée au Luxembourg, dans l’audit qu’elle consacre aux moyens mis en place par les Vingt-sept et la Commission européenne pour lutter contre ce fléau.
Au niveau mondial, il concerne entre 10 à 26 millions de tonnes de captures par an, pour une valeur comprise entre 10,4 et 23,9 milliards d’euros environ, selon des estimations publiées dans PlosOne en 2009 et reprises dans ce rapport. Or ce commerce illégal finit notamment dans les assiettes des consommateurs européens, premiers importateurs au monde des produits de la pêche.
Or les pratiques illicites sapent les efforts déployés pour gérer les captures de manière durable et « mènent certains stocks au bord de l’effondrement », alors que la ressource halieutique est déjà mise à mal, avec 94 % des populations qui sont soit surpêchées soit exploitées au maximum de leur capacité.
Des cartons jaunes et rouges contre la déloyauté
La politique commune de la pêche relève de la compétence exclusive de l’Union européenne : c’est aux Etats membres de se donner les moyens de la mettre en œuvre. Après s’être plongée dans les dédales des contrôles et des sanctions propres à chacun d’entre eux, Eva Lindström, responsable de cet audit réalisé en réponse à une demande du Parlement de Strasbourg, conclut à « une efficacité partielle » qui pâtit d’une trop grande disparité et d’un certain manque de diligence.
L’UE importe 60 % des produits de la pêche qu’elle consomme, moyennant 23 milliards d’euros de dépenses (2020)
Cependant, l’exercice n’est pas simple. L’UE importe 60 % des produits de la pêche qu’elle consomme, en provenance de Norvège surtout, puis de la Chine, de la Grande-Bretagne, de l’Equateur, du Maroc, des Etats-Unis et de l’Islande – moyennant 23 milliards d’euros de dépenses en 2020. Mais ses contrôles doivent aussi s’appliquer à l’égard de ses propres flottes, qu’elles mènent leurs campagnes dans la Baltique, la Manche, en Méditerranée ou bien qu’elles traquent les thons dans l’océan Indien. Avec leurs 79 000 navires, les flottes européennes apportent ainsi 6 % de la production mondiale et génèrent 6,3 milliards de recettes par an.
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