Ce fut, dimanche 16 octobre, l’un des passages du discours de Xi Jinping les plus applaudis par les délégués du 20e congrès du Parti communiste chinois. « Il est nécessaire d’accélérer la transformation de notre pays en une puissance agricole (…). Nous consoliderons sur tous les plans la base de la sécurité alimentaire (…) de sorte que la Chine puisse assurer au peuple son “bol de riz quotidien” », a déclaré le président chinois.
De fait, l’été a été rude pour les agriculteurs et les responsables de ce secteur stratégique. Des réserves d’eau à sec, des dizaines de millions de foyers privés d’électricité, des milliers d’usines à l’arrêt, des paysans qui, partout dans le pays, s’inquiètent des faibles récoltes… La Chine est loin d’avoir tiré toutes les leçons de l’été exceptionnel qu’elle vient de connaître, mais il est d’ores et déjà évident que le réchauffement climatique aura des effets encore plus dévastateurs qu’anticipé, notamment sur l’agriculture. « Le gouvernement fait tout pour ne pas inquiéter la population, mais la situation est vraiment très grave », confie un expert chinois qui souhaite rester anonyme.
Jamais les températures n’ont été aussi élevées dans le pays : 45 °C relevés à Chongqing, le 18 août, un record pour une ville chinoise ; 40 °C dépassés dans de nombreuses provinces. Et jamais la sécheresse n’avait duré aussi longtemps. La province du Jiangxi a déclaré, pour la première fois, « l’alerte rouge », le 23 septembre. A cette date, la quasi-totalité de cette province n’avait pas reçu la moindre goutte d’eau depuis soixante-dix jours. Les premières pluies sont tombées le 6 octobre, après avoir été provoquées artificiellement. Dès le 7 octobre, la province a de nouveau déclenché l’alerte rouge. Depuis, celle-ci est maintenue.
Le Jiangxi possède une particularité : il abrite le lac Poyang, la plus grande réserve d’eau douce du pays (25 km3). Or, depuis juin, le niveau d’eau y est passé de 19 mètres à 7 mètres. « Il n’a sans doute jamais été aussi bas depuis huit siècles », juge Xu Yinlong, chef scientifique à l’Académie chinoise des sciences de l’agriculture et membre de la délégation chinoise à la Conférence des parties (COP21). « Il n’y a rien dans l’histoire climatique mondiale qui soit comparable à cette vague de sécheresse et de chaleur qui frappe la Chine cette année », affirme même l’historien du climat Maximiliano Herrera.
Des phénomènes violents se multiplient
Bien qu’exceptionnels, ces phénomènes s’inscrivent dans une trajectoire qui inquiétait déjà les experts jusque-là. « En 2021, la température moyenne au sol en Chine était de 0,971 °C supérieure à la normale, la plus élevée depuis le début du XXe siècle. Sur les dix années les plus chaudes depuis 1901, neuf sont au XXIe siècle », analyse l’édition 2022 du Livre bleu sur le changement climatique en Chine, publié début août par l’administration de la météorologie nationale.
Il vous reste 70.43% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.