La Chine est souvent désignée comme le bouc émissaire du réchauffement climatique anthropique. Ses représentants à la COP27 ont pourtant réaffirmé leur détermination à participer à la lutte. Dans les faits, qu’en est-il réellement ?
La Chine, c’est un mastodonte. L’un des plus grands pays de la Planète qui pèse de tout son poids sur l’économie mondiale et qui émet aussi, à lui seul, près d’un tiers des gazgaz à effet serre qui détraquent notre climat : en 2017, quelque 10 milliards de tonnes équivalent dioxyde de carbonedioxyde de carbone (tCO2e). Soit 27 % des émissionsémissions mondiales. Alors que la France ne compte que pour environ 1 % de ces mêmes émissions…
Ces chiffres expliquent pourquoi, lorsqu’il est question de lutte contre le réchauffement climatique anthropique, c’est très naturellement vers la Chine que tous les regards se tournent. L’Agence internationale de l’énergieénergie (AIE) apporte une précision intéressante en la matièrematière : près de 90 % des émissions de gaz à effet de serre de la Chine — et pas loin de 50 % de ses émissions de CO2 — sont produites par le secteur de l’énergie !
Le saviez-vous ?
La Chine produit plus de la moitié de l’acier et du ciment dans le monde. Les émissions de CO2 de ces secteurs sont supérieures aux émissions totales de CO2 de l’Union européenne.
Il faut dire que depuis 2005, la consommation d’énergie dans le pays a tout simplement doublé. La Chine est le deuxième plus grand consommateur de pétrolepétrole au monde. Côté électricité, plus de 60 % de la production reste assurée par des centrales à charbon. Sans conteste les plus polluantes de toutes. Pire, de nouvelles centrales à charbon continuent d’être construites. Alors même que sans investissements supplémentaires, un « business as usual » conduirait déjà à l’émission de 175 gigatonnes de CO2 d’ici 2060. Soit un tiers du budget carbone mondial restant si nous espérons maintenir le réchauffement climatiqueréchauffement climatique anthropique sous la barre du 1,5 °C.
Le fait que le président Xi Jinping ait décidé de ne pas prendre part à la COP27, la 27e Conférence des parties signataires de la Convention-Cadre de l’Organisation des Nations unies sur les changements climatiques, à Charm el-Cheikh en Égypte, ajoute encore un peu à la tentation de désigner le pays coupable de tous (ou presque) les maux de notre climat.
De la nuance
Certains appellent toutefois à ne pas tirer de conclusions trop hâtives en la matière. Ramenée aux quantités de CO2 émises par habitant, la Chine rentre en effet un peu plus dans la norme. Alors que la moyenne mondiale se situe autour de 4,4 tCO2 par an et par habitant, la Chine arrive à environ 7 tCO2. C’est deux fois moins que… les États-Unis. Avec tout de même une tendance qui reste à la hausse pour le premier et qui est à la baisse pour le second. Mais, historiquement, ce sont bien les États-Unis et l’Europe qui ont le plus contribué à l’augmentation de la concentration de CO2 dans notre atmosphère : respectivement 25 et 22 % depuis le milieu du XVIIIe siècle contre moins de 13 % pour la Chine.
C’est d’ailleurs ce que défend le pays : en tant que premiers contributeurs historiques au réchauffement climatique, les pays développés se doivent d’être les premiers à fournir des efforts d’atténuation. Pour autant, la Chine a vraiment commencé à balayer devant sa porteporte, prenant sa transition énergétiquetransition énergétique à bras le corps.
La Chine en pleine transition énergétique
Notons d’abord que l’intensité énergétique — la consommation d’énergie ramenée au produit intérieur brutproduit intérieur brut — de la Chine a déjà considérablement diminué. L’AIE estime que l’augmentation de la consommation dans le pays devrait atteindre un palier avant 2030.
En parallèle, le président Xi Jinping annonçait, l’an dernier, que le pic de production de charbon de son pays serait atteint en 2025. La Chine s’est, depuis, engagée à sortir du charbon d’ici 2050. Et d’ores et déjà à ne plus exploiter de mines à l’étranger. Les projets de coopération que le pays développe aujourd’hui du côté de l’Afrique, notamment, portent surtout sur des barrages hydroélectriques. Des projets solaires et éoliens aussi.
Parce que c’est bien sur les énergies renouvelables que la Chine mise. Elle produit elle-même de quoi exploiter les énergies solaire et éolienne. Elle a investi dans le secteur entre 2015 et 2021, presque autant que l’ensemble des économies dites avancées. Résultat, les ajouts de capacité solaire photovoltaïque — parfois à grands coups d’expropriations de terresterres — ont dépassé en Chine ceux de n’importe quel autre pays. La province du Shanxi, la principale productrice de charbon du pays, s’est ainsi couverte de moyens de production renouvelables. Depuis environ cinq ans, plus 63 % de capacité de production solaire par an et plus 24 % de capacité de production éolienne. Un rythme qui laisse rêveur.
Aujourd’hui, les énergies renouvelables comptent pour près de 30 % de la production d’électricité du pays. L’objectif annoncé étant de multiplier encore la production — essentiellement solaire et éolien — du pays par sept d’ici 2060 — et par rapport à 2020. Le tout en espérant atteindre un pic de ses émissions en 2030 et la neutralité carboneneutralité carbone en 2060 — un peu tard, tout de même, si nous espérons maintenir le réchauffement climatique dans les limites de l’Accord de Paris sur le climat.
Peut-on faire confiance à la Chine pour cela ? Si l’on se base sur les précédents objectifs que le pays s’était fixés : très probablement oui ! Sur la période 2011-2015, par exemple, la Chine avait prévu d’installer 21 gigawatts (GW) de capacité solaire photovoltaïque. Le pays en a installé près de 45. Même situation pour la période 2016-2020. La Chine avait ciblé 110 GW et en a finalement installé pas moins de 253 !
La Chine vient par ailleurs de présenter un nouveau plan pour limiter ses émissions de méthane (CH4), aux côtés du CO2, un autre puissant gaz à effet de serre. Il faut dire que le pays est, là aussi, le plus gros émetteur au monde. En cause : le gaz qui s’échappe lors de l’exploitation du charbon — celui que les experts appellent le méthane de houille –, mais aussi l’élevage et la riziculture. Des émissions fugitives pas faciles à maîtriser. Parmi les pistes envisagées, il y a tout de même l’utilisation du méthane de houille qui donne déjà des motifs de satisfaction dans le nord du pays.
La Chine, enfin, n’est pas la dernière à soutenir les projets de transition énergétique à l’étranger. Et même à débloquer des fonds au titre des pertes et préjudices. Assumant ainsi une part de sa responsabilité dans la situation de crise climatique dans laquelle se trouve le monde aujourd’hui. Pékin vient par exemple d’annoncer sa volonté de verser 14 milliards de dollars pour aider le Pakistan après les terribles inondationsinondations qu’a connues le pays en cet été 2022.