Le ministre de la Santé a annoncé l’accès d’un traitement aux “résultats extraordinaires” pour les enfants atteints de mucoviscidose dès l’âge de 6 ans. Comment fonctionne ce médicament?
Un médicament révolutionnaire contre la mucoviscidose. François Braun, le ministre de la Santé, a annoncé l’extension de l’accès au Kaftrio, un traitement innovant qui ne guérit pas de la maladie, mais réduit sensiblement les symptômes. Jusqu’à présent, ce traitement ne s’adressait qu’aux enfants de plus de 12 ans porteurs d’une certaine mutation du gène de la maladie.
Un bébé sur 4500
Quelque 700 nouveaux jeunes patients âgés de 6 à 11 ans, porteurs de cette même mutation, devraient ainsi bénéficier de cette thérapie. Au cours du premier trimestre 2023, “ce seront près de 5000 personnes atteintes de mucoviscidose qui auront accès à ce traitement innovant en France”, se félicite dans un communiqué l’association Vaincre la mucoviscidose
Depuis le mois de juin 2021, le traitement était réservé en France aux patients de plus de 12 ans. Mais en mars dernier, la Haute Autorité de santé avait rendu un avis favorable pour son accès précoce dès 6 ans. Et environ 200 enfants de cet âge en impasse thérapeutique avaient pu en bénéficier à titre exceptionnel.
En France, une centaine d’enfants atteints de mucoviscidose naissent chaque année, soit en moyenne un nouveau-né sur 4500, selon les données de l’Inserm. Aujourd’hui, le pays compte quelque 7300 personnes touchées par cette maladie, qui se manifeste le plus souvent dès la naissance ou dans les premiers mois de vie.
Une maladie incurable
La mucoviscidose, qui touche principalement les poumons et le système digestif, est une maladie génétique grave et incurable. Elle est précisément liée à une anomalie du gène codant pour la protéine CFTR, porté par le chromosome 7, indique l’Inserm.
Cette protéine est présente dans la membrane des cellules respiratoires ou digestives et fonctionne comme un canal. En clair: elle permet d’assurer la fluidité du mucus présent dans les bronches, le tube digestif, le foie ou le pancréas. Mais lorsque le gène de cette protéine est muté, “le canal dysfonctionne”, poursuit l’Inserm.
Ce qui entraîne l’apparition des symptômes de la mucoviscidose: l’épaississement du mucus encombre les bronches jusqu’à conduire à une insuffisance respiratoire; l’hyperviscosité des sécrétions du pancréas provoque notamment une mauvaise absorption des aliments, pouvant aller jusqu’à un diabète et une insuffisance pancréatique.
Des améliorations dès le 15e jour
Développé par le laboratoire américain Vertex, le Kaftrio est une combinaison de trois molécules (dite trithérapie) de modulateurs de la protéine CFTR. Ces modulateurs de ne sont pas nouveaux, les premiers ont été mis au point au début des années 2000.
Certains corrigent les anomalies de la protéine, d’autres stimulent son activité. En ce qui concerne le Kaftrio, il s’agit de deux substances qui augmentent le nombre de protéines CFTR et d’une autre qui améliore son activité, détaille le dictionnaire médical Vidal. Un traitement qui se prend à vie et réduit considérablement les symptômes de la maladie.
“Les résultats sont extraordinaires, ils permettent une vie quasiment ordinaire”, a déclaré le ministre au Journal du dimanche. La Haute Autorité de santé saluait elle aussi une association de médicaments permettant aux patients “de mieux respirer, d’être moins souvent malades et de reprendre du poids”. Elle notait d’ailleurs des améliorations “dès le 15e jour de traitement”.
Un tiers des malades exclus du traitement
“L’accès à Kaftrio représente un grand soulagement pour les patients concernés et leur famille”, applaudit l’association Vaincre la mucoviscidose. “Bien que ce traitement ne guérisse pas et qu’il ne faille pas s’attendre chez ces enfants à des effets aussi spectaculaires à court terme que ceux observés chez des adultes sévèrement atteints, il permet d’espérer en une évolution différente de la maladie, en préservant et stabilisant leur capital santé.”
Certains médecins envisagent même des perspectives encore plus prometteuses. “L’idée, véritablement, c’est dès trois semaines de vie, alors que le bébé n’a absolument aucun symptôme et aucune lésion importante au niveau pulmonaire, pouvoir donner ces traitements pour envisager de ralentir, ou même d’empêcher l’installation de cette maladie au niveau pulmonaire”, estime pour France 2 Isabelle Sermet-Gaudelus, pédiatre à l’hôpital Necker-Enfants Malades (AP-HP).
Cependant, ce médicament ne s’adresse pas à tous les malades mais uniquement à ceux porteurs d’au moins une mutation F508del – la mutation la plus fréquente, présente chez environ 70% des malades.
Ce qui signifie qu’un tiers des patients atteints de mucoviscidose en sont exclus du fait de leur profil génétique ou d’une greffe pulmonaire, regrette l’association Vaincre la mucoviscidose. Des patients qui “restent toujours en attente d’une innovation thérapeutique”.