Le débat n’est pas tranché sur les causes de l’effondrement de la civilisation maya. Mais le voile se lève sur celles de la chute de Mayapan, dernière grande capitale de la période dite postclassique (1200-1450) de la péninsule du Yucatan, dans le sud-est du Mexique. Une trentaine d’archéologues, de géologues, d’ostéologues ou de paléoclimatologues ont participé à une étude transdisciplinaire qui révèle la corrélation entre un changement de climat et des conflits politiques déterminants. Leur article, publié le 19 juillet dans Nature, prend des airs prophétiques pour nos sociétés modernes.
Sa pyramide à degrés trône toujours à 18 mètres de hauteur. Mayapan, qui signifie « étendard du peuple Maya », dominait le sud-est du Mexique avant son brusque abandon, vers 1450. Apparue autour de l’an 1100, juste après le déclin de Chichen Itza, Mayapan s’étendait sur 4,2 kilomètres carrés, entourée d’une végétation luxuriante. A l’époque, les deux cités sœurs consacrent une place de choix à Kukulkan, le serpent à plumes. L’ombre de son corps apparaît sur les parois de leurs grandes pyramides, lors des équinoxes à Chichen Itza, le jour du solstice d’hiver à Mayapan.
« La ville accueillait entre 15 000 et 20 000 habitants qui vivaient du commerce, des vergers domestiques et de la culture du maïs, très dépendante de la pluviosité, explique au Monde Marilyn Masson, archéologue à l’université d’Albany, aux Etats-Unis, et coautrice de l’étude. La chute tardive de la cité, peu avant l’arrivée des explorateurs espagnols, en fait un terrain d’étude exceptionnel pour examiner l’impact du climat sur les conflits civils. »
Graves famines et tensions politiques
Les fouilles ont révélé l’existence de plusieurs fosses communes. La dernière a été trouvée juste à côté du temple de Kukulkan. L’équipe scientifique, composée de chercheurs américains, australiens, anglais, canadiens et mexicains, a daté au carbone 14 le collagène osseux des squelettes. L’analyse a aussi révélé des blessures mortelles, confirmant que des massacres ont précédé le déclin puis la chute de Mayapan.
« Nous avons ensuite comparé ces données avec les indicateurs paléoclimatiques permettant d’identifier les évolutions des précipitations et leur impact sur l’environnement », raconte Marilyn Masson. Les chercheurs se sont notamment basés sur les coupes d’une stalagmite découverte à l’intérieur d’une grotte située sous la place centrale de Mayapan. Ils ont ainsi constaté que la hausse des précipitations, entre 1100 et 1340, correspondait à une période d’augmentation de la population urbaine. A l’inverse, d’importantes sécheresses successives, entre 1400 et 1450, coïncident avec des conflits sociopolitiques. Au point d’affirmer que le déclin et l’abandon de Mayapan sont liés à cette période d’assèchement des sols. Et Marilyn Masson d’expliquer : « Ce manque prolongé d’eau a provoqué des pertes de récoltes, entraînant de graves famines, qui ont intensifié les tensions politiques, débouchant sur des massacres entre des factions dirigeantes. »
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