De mémoire de bateliers et d’armateurs fluviaux, on avait rarement connu une situation aussi difficile sur certains canaux de France depuis 1976, l’année de la « grande sécheresse ». Celle de l’été 2022 a réduit le débit des cours d’eau et abaissé la ligne d’eau, affectant le transport de marchandises et le tourisme fluvial dans certaines régions françaises, notamment le Nord-Est. Mais malgré la persistance du déficit en pluie, la situation reste stable, selon Voies navigables de France (VNF).
« Actuellement, 591 kilomètres de canaux ont dû être fermés, soit moins de 10 % des 6 700 kilomètres que nous gérons », souligne Cécile Avezard, directrice territoriale Rhône-Saône de l’établissement public. Si l’on ne considère que les canaux à petit gabarit à double vocation transport et tourisme, le pourcentage atteint 15 %. « La situation est très contrastée suivant les régions », constate-t-elle. Les liaisons Champagne-Bourgogne, Saône-Marne, le canal des Vosges, le canal de Bourgogne, celui de la Meuse, la liaison Marne-Rhin (jusqu’à Nancy) ont dû être fermés, ainsi qu’une partie de la Moselle. Comme dans la région de Langres (Haute-Marne), il s’agit souvent de donner la priorité à l’approvisionnement en eau potable.
Si le Nord-Est est plus touché, c’est que l’alimentation des canaux reliant fleuves et rivières est fragile et n’a pu être assurée par les cours d’eau naturels. La capacité de la cinquantaine de barrages-réservoirs servant à réguler leur niveau a aussi baissé. Cela oblige parfois les chargeurs à limiter à un tiers la capacité d’emport des bateaux pour ne pas toucher le fond. D’autres zones ont aussi donné la priorité à l’activité touristique, cruciale en cette saison. « VNF gère la situation avec les opérateurs du tourisme fluvial et anticipe pour que les bateaux soient déplacés vers les secteurs où le niveau d’eau est bon », explique Mme Avezard.
« Non saturé »
La France dispose, selon elle, d’un « réseau extrêmement résilient », qui permet la poursuite de tous les usages économiques de l’eau : transport, production d’électricité, irrigation des cultures et tourisme. Beaucoup moins stratégique qu’en Allemagne, le transport sur les grandes voies équipées de barrages-réservoirs (Rhône, Seine, Oise, Saône, Yonne…), permettant de freiner l’écoulement vers la mer, n’a pas été très perturbé.
Sans créer de nouveaux barrages-réservoirs, remplis à 43 % seulement en ce moment, la capacité de retenue pourrait passer de 165 millions de mètres cubes à 190 millions de mètres cubes, estime-t-on à VNF, qui négocie avec les collectivités locales, cofinanceurs des projets. « Le réseau est fluide et non saturé, explique Thierry Guimbaud, directeur général de VNF. Il pourrait accueillir jusqu’à quatre fois plus de trafic sur certains axes, comme la Seine et le Rhône. »
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