Publié le 2 sept. 2022 à 9:26Mis à jour le 2 sept. 2022 à 9:27
A quelques jours des auditions devant l’Autorité de la concurrence (ADLC) pour la fusion TF1/M6, Canal+ met un grand coup de pression. Le groupe a « coupé » le signal de TF1 et des chaînes TNT (TMC, TFX, TF1 Séries Films, LCI).
En cause ? Les conditions de renouvellement des contrats de distribution des chaînes par Canal+, qui en plus d’être un éditeur de chaînes est un distributeur de bouquets comme un opérateur télécom. Selon le communiqué de Canal, « TF1 a manifesté sa volonté de revoir profondément ses exigences commerciales à compter du 31 août 2022 ».
TF1, fort de « sa position dominante », exige en particulier le « versement d’une rémunération très conséquente » pour ses chaînes « gratuites » de la TNT, dit la filiale de Vivendi.
« Face à ces exigences infondées et déraisonnables pour des chaînes qui sont accessibles gratuitement pour tous et qui doivent le rester, le Groupe Canal+, partenaire de longue date du Groupe TF1, est contraint de renoncer à diffuser ces chaînes en France métropolitaine ».
«Semaines de discussions»
« On déplore fortement cette situation, qui pénalise nos consommateurs », répond TF1, évoquant des « semaines de discussions ». « On a signé des accords avec tous ces dernières années, sur la même base. Nous regrettons que cette volonté ne soit pas partagée par Canal ».
On semble revenir quelques années en arrière quand Canal+ avait coupé le signal de TF1, au plus fort de la guerre pour le signal des telcos avec les différents groupes de télévision.
Un retour à la guerre des telcos en 2017-2019
Car le sujet est bien connu et promettait de revenir sur le devant de la scène à chaque renouvellement de contrat. L’argumentaire peut se résumer assez simplement. Les chaînes estiment que puisque les opérateurs télécoms diffusent leurs programmes et font payer leurs consommateurs pour cela (offre triple play etc.), ils doivent payer. En face, les telcos rétorquent qu’ils contribuent à leur apporter plus d’exposition, et donc d’audience, que les chaînes monétisent grâce à la publicité. Et arguent que les chaînes sont «gratuites».
En 2018, la filiale de Vivendi avait déjà « coupé » un temps le signal de TF1… ce qui avait généré une baisse des audiences et une polémique . Le ministre de la Culture notamment avait dû intervenir.
Au final à l’époque, TF1 avait réussi à signer des contrats « globaux » avec les différents opérateurs et distributeurs incluant les chaînes en clair et les services associés (replay etc.), parvenant à engranger autour de 50-60 millions.
Timing notable avant l’antitrust
Le « timing » de cette annonce est intéressant alors que les auditions devant l’Autorité de la concurrence démarrent ce lundi pour le grand projet de mariage entre TF1 et M6. Les concurrents et distributeurs n’ont jamais caché leurs réserves sur l’opération, faisant valoir justement la position « dominante » du nouveau groupe dans le paysage, notamment vis-à-vis des distributeurs : ils seraient en position de force pour mieux négocier.
Bouygues a promis dans ses engagements dévoilés mi-août destinés à convaincre l’antitrust à ce que les contrats avec les « telcos » françaises et Canal+, qui paient pour avoir les chaînes dans leurs bouquets, soient prolongés d’un an.
Avec cette coupure du signal, Canal + signale bruyamment ses inquiétudes….
Le bras de fer a commencé. Difficile de dire quand il se terminera. En tout cas, Canal + a d’ores et déjà prévenu qu’il était capable d’aller loin : « conscient de l’importance de la Coupe du monde de football (20 novembre – 18 décembre, ndlr) pour ses abonnés, et fort de son partenariat avec beIN Sports qui détient l’intégralité des droits de la compétition, le groupe Canal+ sera en mesure de proposer l’intégralité de l’évènement à ses abonnés ».