Les yeux verts de Sassui sont perdus dans le vide. Ses genoux contre sa poitrine, la petite fille de 9 ans se recroqueville sur elle-même. Accablée par la fièvre et la chaleur humide, elle ne répond que par des hochements de tête. L’enfant a récemment contracté le paludisme, cette maladie transmise par les piqûres des moustiques et qui tue des centaines de milliers de personnes par an. « Dans chaque tente, il y a au moins un enfant malade, certains souffrent d’une simple fièvre et de toux, d’autres, comme ma fille, ont le paludisme », s’inquiète Heer Jagirani, la frêle maman d’une quarantaine d’années.
Cette famille de sept enfants a été contrainte de quitter sa maison fin août, lorsque des pluies torrentielles se sont déchaînées sur le village de Pir Ghafara Shah et sur toute cette région du Sind, située dans le sud du Pakistan. De cette commune, il ne reste qu’un tas de pierres dans la boue. Depuis, tous ses habitants ont trouvé refuge sur un chemin de terre, non loin de leur ancien village. Quasiment toute la province a été engloutie et leur campement est cerné par les eaux. Le déluge a laissé derrière lui un grand océan maillé de quelques routes principales.
Menace sanitaire
Dans ces paysages aqueux, les épidémies prolifèrent. Et la menace sanitaire plane plus lourdement sur les populations vulnérables : les femmes et les enfants. Ces inondations ont déjà coûté la vie à près de 1 400 personnes depuis le milieu du mois de juin, dont 280 femmes et près de 500 enfants. « Cette eau attire de nombreux moustiques qui rendent nos enfants malades », indique Heer Jagirani, remettant en place son voile coloré sur sa tête. Une flambée de paludisme et de dengue sévit déjà dans la région.
Depuis le début du mois d’août, 15 000 cas de paludisme ont été détectés, rien que dans la province du Sind, selon un officiel du ministère de la santé local. « Mais le nombre réel est encore plus élevé », concède-t-il, sous le couvert de l’anonymat. Les hôpitaux de Karachi, la capitale du Sind, croulent sous les patients atteints de la dengue.
Les diarrhées et les infections fongiques qui rongent la peau des enfants se multiplient. « Plus de la moitié des enfants qui consultent souffrent de diarrhée et le nombre de bébés en état de malnutrition est en hausse », confirme Peer Ashfaque Ahmed, administrateur de l’hôpital Kausar pour femmes et enfants dans la ville de Khairpur. Une catastrophe dans une province où près d’un enfant sur deux souffre déjà d’un retard de croissance. Le choléra, les infections respiratoires aiguës ou encore la typhoïde ont également été signalés dans les zones touchées par les inondations, selon l’Organisation mondiale de la santé. Ce funeste tableau fait redouter une augmentation de la mortalité infantile.
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