Aléas à l’origine de nombreuses catastrophes, les tsunamis sont provoqués par la brusque mise en mouvement d’un grand volume d’eau dans un océan, une mer ou un lac. Si les séismes constituent l’une de leurs sources bien connues, des éruptions volcaniques peuvent également en être la cause. Rares sont cependant les situations où l’effondrement d’une caldeira, l’éjection d’une coulée pyroclastique ou le déclenchement d’une explosion sous-marine est à même de générer une vague transocéanique.
Dès lors, comment expliquer les étonnants événements du samedi 15 janvier ? Ce jour-là, la soudaine explosion d’un volcan sous-marin a, pour la première fois, été suivie d’une série de tsunamis qui ont non seulement été détectés sur toutes les mers du globe, mais ont perturbé leurs surfaces pendant une durée exceptionnelle de quatre à cinq jours. « Parti de l’archipel des Tonga, un chapelet d’îles situé à l’est de la Nouvelle-Calédonie, le premier de ces raz de marée va, en se déplaçant à une vitesse de plus de 1 000 km/h, soit 1,5 à 2,5 fois supérieure à la normale, parvenir à traverser les océans Pacifique, Indien et Atlantique en moins d’une vingtaine d’heures », raconte Robin Lacassin, directeur de recherche CNRS à l’Institut de physique du globe de Paris (IPGP). « Il viendra frapper les côtes du Portugal et de l’Italie encore plus rapidement que s’il était parvenu… à emprunter la voie directe en sautant par-dessus les continents ! »
Autre bizarrerie : le phénomène s’est assez peu atténué avec la distance, et a continué à générer des vagues à des milliers de kilomètres de distance. Ainsi, dans certaines régions lointaines de la bordure du Pacifique, l’augmentation du niveau de la mer relevée sur le littoral a été quasiment la même que celle enregistrée à la source. Si des vagues de plusieurs mètres ont été observées sur certaines parties de la côte de l’île Tonga, causant la mort de quatre personnes, à d’autres endroits de l’archipel, la montée des eaux est restée limitée à 1,14 mètre. Une valeur équivalente à celle qui fut bientôt mesurée à 10 000 kilomètres de là, au Chili, par les stations hydrographiques d’Arica (1,18 mètre) et de Coquimbo (1,43 mètre) !
Gigantesque colonne de poussières
Cet étonnant tsunami d’échelle globale résulte d’une suite de phénomènes, dont certains n’avaient pas encore été étudiés avec des moyens modernes et d’autres étaient proprement inconnus. La nature de l’éruption elle-même pose problème. Cette dernière a fait intervenir un volcan, le Hunga Tonga, entré en activité en décembre 2021. « Cet important édifice sous-marin de 1 800 mètres de haut, dont seule la partie supérieure de la caldeira émerge à la surface sous forme de deux petites îles, va connaître, à partir du 13 janvier, une série d’explosions dont l’une, paroxystique, le 15 janvier à 4 h 10 UTC, sera si forte qu’elle sera entendue à 10 000 kilomètres de là, en Alaska : elle produira le plus haut panache jamais mesuré ! », explique Raphaël Grandin, enseignant-chercheur à l’IPGP.
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