Avec ses 2 milliards $ US, Hydro-Québec a payé le double de la somme payée par le vendeur ArcLight Capital Partners, il y a à peine 5 ans, pour acheter Great River Hydro en Nouvelle-Angleterre.
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L’acquisition de Great River Hydro et de son parc hydroélectrique devrait générer des revenus additionnels pour Hydro-Québec dès la première année, mais la rentabilité à long terme de l’investissement dépendra grandement des fluctuations de prix du marché.
Rappelons que ArcLight Capital Partners, une société de capital-investissement basée à Boston, avait acquis ces 13 centrales hydroélectriques en 2017 pour 1,07 milliard de dollars américains, soit la moitié du prix payé par Hydro-Québec.
« J’ai mes réserves sur le prix payé par Hydro-Québec dans cette transaction. En ce moment, la valeur de ces actifs-là est probablement la plus élevée qu’on ait vue depuis 12 ans au moins, c’est pourquoi Hydro a payé cher », souligne Jean-Thomas Bernard, professeur au Département de science économique de l’Université d’Ottawa.
En termes boursiers, on pourrait dire qu’Hydro a acheté Great River Hydro au « sommet ».
Pari risqué
Le marché de l’électricité en Amérique du Nord est un marché mature, explique M. Bernard. Le prix du gaz naturel, qui varie main dans la main avec celui de l’électricité dans le Nord-Est américain, a explosé cette année. Mais rien ne garantit qu’il demeurera aussi élevé.
« Avec la révolution du gaz de schiste autour de 2008, le prix du gaz avait chuté énormément, autour de 3 $ US le MMBtu (million d’unités thermiques britanniques), une mesure comparable au kilowatt/heure pour l’électricité. Mais ça a remonté beaucoup depuis. Aujourd’hui, les prix sont élevés. On est à plus de 6 $ le MMBTU. C’est le double du prix des dernières années ! Le pari d’Hydro, c’est que le prix du gaz naturel va rester élevé. Mais s’il revient à 3 $ comme avant, ça ne sera pas une si bonne affaire », dit Jean-Thomas Bernard.
Marché du carbone
Mais un élément joue en faveur d’Hydro-Québec : le Regional Greenhouse Gas Initiative (RGGI).
Photo Agence QMI, Maxime Deland
Pierre-Olivier Pineau, HEC Montréal
« Le marché de la Nouvelle-Angleterre fait partie d’un marché du carbone comprenant 11 États, dont New York. Ce marché est spécifique au secteur de l’électricité et a des plafonds décroissants jusqu’en 2030 », souligne Pierre-Olivier Pineau, titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie à HEC Montréal.
Puisque le gaz naturel émet des gaz à effet de serre, les producteurs d’électricité au gaz naturel vont devoir payer de plus en plus cher. « C’est une certitude que le prix du gaz naturel va être relativement élevé jusqu’en 2030 et probablement au-delà », ajoute-t-il.
Il calcule qu’en ce moment, le marché du carbone (RGGI) compte pour environ 70 cents du prix du gaz naturel de 6,4 $ US par MMBtu.