« Oui, la France et l’Allemagne sont en désaccord sur de nombreux points, nous sommes nous-mêmes en désaccord avec la France et l’Allemagne sur plusieurs sujets », a lancé Mark Rutte, le premier ministre néerlandais, à son arrivée à la réunion des chefs d’Etat et de gouvernement européens à Bruxelles, jeudi 20 octobre. Avant de poursuivre : « C’est ça, l’Europe. Vous en parlez, parfois toute la nuit, pour surmonter ces désaccords. » Cette fois, c’est le sujet de la flambée des prix de l’énergie qui préoccupe autant qu’il divise les Européens, et plus particulièrement le couple franco-allemand.
Les Vingt-Sept l’ont longuement évoqué, onze heures durant, jeudi, jusque tard dans la nuit, alors que les factures de gaz et d’électricité atteignent des sommets, que des entreprises préfèrent mettre à l’arrêt certaines de leurs usines plutôt que de les payer, que la colère sociale monte et que la récession s’annonce, avec son lot de faillites et de chômeurs. Ils n’ont pas trouvé de solution miracle, mais ils se sont mis d’accord pour demander à la Commission d’explorer « urgemment » des pistes dont certains – Allemagne en tête – ne voulaient pas entendre parler.
Cela « envoie un signal clair au marché de notre détermination à lutter contre toute forme de spéculation », a commenté le président français, Emmanuel Macron. Cela envoie également un signal d’« unité » à Vladimir Poutine, qui mise sur la division des Européens depuis des mois. Certes, mais rien ne garantit, à ce stade, que cela fera baisser les prix.
Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le 24 février, les Européens se sont organisés pour pouvoir se passer de gaz russe : baisse de leur consommation, diversification de leurs achats, montée en puissance des renouvelables. « La Russie a réduit de deux tiers ses livraisons de gaz à l’Union européenne. Nous avons été capables de compenser » cette chute, a rappelé Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission.
« Nous allons dans une direction terra incognita »
Aujourd’hui, les Vingt-Sept cherchent une parade à l’envolée des prix du gaz et de l’électricité, qui sont liés. Le 18 octobre, l’exécutif communautaire a mis des premières propositions sur la table – achat commun de gaz, préparation d’un nouvel indice de référence, solidarité entre Etats membres, mécanisme de correction du marché, afin de bloquer les prix du gaz quand ils sont trop volatils et excessifs –, que plusieurs Etats membres ont jugé insuffisantes. Dans la nuit de jeudi à vendredi 21 octobre, ils ont décidé, tout en multipliant les garde-fous, d’étudier un autre mécanisme de plafonnement des prix, dit « ibérique » – pour le gaz servant à produire de l’électricité –, et de réfléchir aux aides dont pourraient bénéficier les pays les plus fragilisés par la crise.
Il vous reste 60.56% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.