La France avait pris l’habitude de fermer des mines plus que d’en ouvrir. Il en existe bien encore en métropole pour le sel gemme, la bauxite, les calcaires bitumineux, le tantale-niobium, et l’on exploite l’or en Guyane comme le nickel en Nouvelle-Calédonie. Mais le pays a dit adieu au charbon, au fer, à l’uranium… La décision du groupe français Imerys, numéro un mondial des minéraux et minerais industriels (kaolin, carbonate de calcium, graphite, pigments blancs…), de lancer une production de lithium dans l’Allier, rompt avec cette tendance des dernières décennies.
Le monde sort peu à peu de sa dépendance au pétrole, et l’industrie devient de plus en plus dépendante des matériaux essentiels à la transition écologique. Du lithium notamment, que certains érigent désormais en « or noir du XXIe siècle ». En France, la prise de conscience du potentiel minier, bien cartographié par le Bureau de recherches géologiques et minières, remonte au milieu des années 2010. Il a alors lancé, en 2015, la réforme du vieux code minier, préalable indispensable à toute exploitation respectueuse de l’environnement.
L’enjeu pour la filière automobile n’est apparu que récemment. Le président de la République a rappelé dans un entretien au quotidien Les Echos, lundi 17 octobre, jour de l’ouverture du Mondial de l’automobile de Paris, qu’« il faut (…) travailler sur toute la chaîne de valeur » de cette industrie. « Nous avons des mines de lithium en France, et nous allons les développer grâce au nouveau code minier ; c’est clé pour notre souveraineté, a annoncé Emmanuel Macron. Nous sommes également en train de développer très fortement le recyclage, que ce soit pour le lithium ou d’autres composants. »
« Pénuries probables »
Juste avant la guerre en Ukraine, déclenchée le 24 février, le gouvernement a engagé une politique de souveraineté minière destinée à sécuriser les approvisionnements du pays en ressources stratégiques. Reprenant une recommandation du rapport de Philippe Varin, ancien patron de PSA et d’Areva, remis en janvier, il prépare un « fonds d’investissement dans les métaux stratégiques pour la transition énergétique » doté de 1 milliard d’euros. Alimenté par des crédits du plan France 2030, il doit financer des projets « risqués et particulièrement importants » : co-investir dans des mines et le raffinage, sécuriser des contrats d’achat à long terme, aider à l’émergence d’une filière du recyclage.
En Europe, la souveraineté minière est désormais jugée aussi importante que la souveraineté sanitaire ou alimentaire. « Le monde d’après sera sans carbone, mais riche en métaux », prévenait M. Varin dans son rapport, centré sur l’approvisionnement de deux filières en lithium, nickel, cobalt et terres rares : véhicules électriques et énergies renouvelables. La consommation de lithium va « dépasser de loin tout ce qu’il est prévu d’exploiter », prévenait, fin septembre, la responsable des minéraux chez le groupe Rio Tinto. Le numéro deux mondial du secteur minier y investit toujours plus et s’intéresse même aux mines désaffectées, expliquait, Sinead Kaufman.
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