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Face aux pires inondations de la décennie, l’entraide s’organise au Nigeria


Des personnes arrivent à bord d’un camion fourni par la marine nigériane pour évacuer les personnes déplacées par les inondations, dans le district d’Ahoada de l’Etat de Rivers, le 22 octobre 2022.

L’autoroute est dévorée par les eaux sombres. Impossible d’avancer. Alors, dans un vacarme propre à l’urgence, des dizaines de Nigérians chargent des embarcations pleines de vivres pour porter assistance aux sinistrés. De l’autre côté, une fois passé les nombreux camions à moitié submergés, un véhicule est rempli de « garri » (farine de manioc), de riz et de nouilles sous les yeux de Bolaji Philips. « Avec ma femme, on a dépensé toutes nos économies, le peu qu’on a, pour aider », assure le quadragénaire, chapeau sur la tête.

Un véritable travail de fourmi se met en place sur le principal axe routier, en partie impraticable, qui relie les Etats de Rivers et de Bayelsa, dans le sud-est du Nigeria, parmi les plus ravagés par les pires inondations de la décennie dans le pays le plus peuplé d’Afrique. En tout, elles ont fait plus de 600 morts et affecté près de 3 millions de personnes dans le pays, selon le dernier bilan des autorités.

Beaucoup ont fui, notamment dans des camps de déplacés surpeuplés. Les autres, complètement coupés du monde, sont restés dans leurs communautés avalées par les flots. Près de la ville d’Ahoada, le travail des bénévoles et des ONG est vital, le temps que l’aide officielle parvienne aux plus démunis.

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« Les dégâts sont énormes. Jusqu’à présent, le gouvernement n’a pas fait grand-chose. On est totalement seuls », lâche Winner Written, un entrepreneur de 32 ans, Crocs multicolores aux pieds. Deux de ses camions-citernes de 45 000 litres de carburant, bloqués par les eaux, sont mis à disposition. La précieuse ressource est chargée dans des jerrycans jaunes à bord des embarcations qui partent pour les villages inondés. « On est juste des individus qui essaient de s’aider les uns les autres », dit-il.

Les autorités locales de Rivers ont annoncé l’allocation de 1 milliard de nairas (2,3 millions d’euros) pour les victimes, surtout à Ahoada. Et les Etats-Unis, à travers leur Agence pour le développement international (Usaid), déclarent avoir fait don de 1 million de dollars en aide humanitaire. Mais sur le terrain, peu en ont vu la couleur. L’approvisionnement en vivres est presque impossible, notamment à cause de forts courants, d’obstacles ou d’une végétation trop importante dans les eaux. A tout cela s’ajoute l’absence de réseau mobile dans les zones reculées.

Insécurité alimentaire et choléra

En débardeur noir, Jeremy Ogboka, 35 ans, donne un coup de main sur une portion de l’autoroute à moitié inondée. Samedi, « un bateau bondé a chaviré », explique ce père de quatre enfants : « Heureusement, on a réussi à sauver tout le monde. On aide comme on peut, mais tellement de gens souffrent ! Déjà deux semaines que la route est bloquée… »

Ici, la Navy (la marine nigériane) assure la sécurité, facilitant l’aide humanitaire. Une mission de sauvetage part vers les zones reculées. A bord des deux embarcations, des membres de l’Agence nationale de gestion des urgences (NEMA) et des soldats de la Navy. Guidés par des jeunes connaissant la route vers les communautés ravagées, les bateaux à moteur s’enfoncent dans la végétation, manquant par deux fois de se faire emporter par le courant.

Après une demi-heure de laborieuse progression, les restes d’un village apparaissent. Aucun signe de vie. Assis à l’avant, le sous-lieutenant responsable de l’expédition ne quitte pas son fusil d’assaut des mains. « Cette zone est instable. Il y a deux mois, nous avons procédé à l’arrestation de criminels et saisi de nombreux fusils », explique-t-il. Autour, presque tout est submergé. Des toitures et le panneau d’une école dépassent, seuls vestiges d’un semblant de vie aujourd’hui engloutis.

Les moteurs des bateaux s’embourbent dans les feuilles tandis que le courant tire. Impossible de se rendre dans un village inondé où certains sinistrés nécessitant des soins médicaux ont réussi à appeler la NEMA. La mission de sauvetage est avortée.

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En plus d’aggraver l’insécurité alimentaire – les récoltes ont été ravagées –, ces inondations particulièrement meurtrières ont provoqué une flambée des cas de choléra, selon l’ONG International Rescue Committee (IRC), qui appelle à davantage de mobilisation face aux besoins « massifs » des populations. En 2012, des inondations particulièrement meurtrières avaient ravagé le Nigeria. « Mais rien n’a été fait derrière pour minimiser les conséquences de nouvelles inondations, se lamente Opuwill Ayitu, un bénévole de 40 ans. Une crise humanitaire approche. »

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Le Monde avec AFP

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Written by Stephanie

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