Cette vague de chaleur est inédite par son caractère tardif, sa durée et son intensité. Mais ce n’est sans doute que le début: le dérèglement pourrait être pire que prévu en France, selon une récente étude.
Depuis la mi-octobre, l’été joue les prolongations. La faute à une remontée d’air chaud en provenance d’Afrique du Nord, qui a traversé l’Espagne, avant d’atteindre le sud de l’Hexagone, puis l’ensemble du territoire, où elle fait largement grimper le thermomètre.
Des records mensuels ont été encore battus ce vendredi, avec par exemple 32,2°C enregistrés ce vendredi à Ger (Pyrénées-Atlantiques) ou 31,1°C à Campistrous (Hautes-Pyrénées). Idem pour les températures minimales, avec 21,4°C à Arles (Bouches-du-Rhône) ou 20,5°C à Nîmes (Hérault) – des températures que l’on devrait observer en plein après-midi à cette période de l’année.
Un mois record
Car cette vague de chaleur est inédite par son caractère tardif, sa durée et son intensité: les températures sont bien au-dessus des normales. Octobre 2022 va ainsi devenir le mois d’octobre le plus chaud depuis le début des relevés de Météo France, en 1945, avec a priori plus d’un degré d’écart avec le précédent record.
“Ce qui est le plus marquant, c’est que ce mois d’octobre sera non seulement le plus chaud, mais il sera de loin le plus chaud”, insiste la climatologue Christine Berne à BFMTV.
Plus globalement, depuis le début de l’année, la France a connu des températures supérieures aux normales de saison près de trois jours sur quatre.
“Cette année 2022, dans son intégralité, est emblématique des effets du changement climatique”, estime le climatologue Christophe Cassou sur son compte Twitter.
“Elle en est un révélateur car partout dans le monde, l’influence humaine (…) n’est plus compatible avec les fluctuations naturelles”, poursuit-il. Surtout, “elle est un avant-goût de notre futur (à l’horizon) 2050”.
Un réchauffement de +3,8°C en France
Ce n’est en effet que le début. Le réchauffement climatique se traduit déjà par une augmentation des vagues de chaleur et par leur étalement dans les saisons. Mais le dérèglement pourrait être pire que prévu en France, selon une étude du CNRM, le Centre national de la recherche météorologique, parue début octobre dans la revue Earth Systems Dynamics.
“Dans un scénario modéré d’émissions de gaz à effet de serre, on arrive en France en moyenne annuelle à un réchauffement de +3,8°C en 2100”, explique Aurélien Ribes, l’un des auteurs de cette étude.
“C’est un niveau déjà très important, qui avait été envisagé auparavant, mais plutôt pour des scénarios beaucoup plus intensifs en utilisations des énergies fossiles”, précise-t-il.
+3,8°C en 2100: par rapport aux précédentes prévisions du réchauffement, cela représente une hausse jusqu’à 50%. Et en été, il pourrait atteindre +5°C. Concrètement, cela voudrait dire que plusieurs régions pourraient connaître des températures de 45°C durant la saison estivale.
Il s’agit cependant d’un scénario moyen: s’il y a des efforts très importants au niveau international, on sera à +2,3°C. Si, au contraire, on continue à avoir un recours massif aux énergies fossiles, comme le pétrole, le gaz et le charbon, les températures moyennes pourraient grimper de 6,7°C.
“Rien n’est inéluctable”
Et un réchauffement climatique qui s’accélère, cela veut dire aussi des phénomènes extrêmes plus forts: vagues de chaleur, sécheresse, ou au contraire épisodes de pluies intenses, voire de neige dans certaines régions – pas en France.
Dans l’Hexagone, “le réchauffement climatique a d’ores et déjà des impacts sur le nombre de jours de gelées dans les hivers”, rappelle Christine Berne.
“Ce phénomène va s’accentuer. Les vagues de froid ne seront pas totalement absentes de nos hivers futurs, mais elles seront moins intenses, vraisemblablement plus courtes. (…) Dans nos régions, les chutes de neige vont devenir extrêmement rares.”
La situation est d’autant plus inquiétante qu’un nouveau rapport de l’agence des Nations unies pour le climat, sorti cette semaine, montre que si les pays baissent leurs émissions de gaz à effet de serre, leurs efforts restent insuffisants. Les climatologues appellent donc à l’action, à l’image de Christine Berne.
“Rien n’est inéluctable”, insiste-t-elle. “On a toujours la possibilité d’inverser la tendance et de revenir à une forme de normalité climatique.” À condition, précise-t-elle, d’adopter “des mesures assez fortes, marquées, de réduction de nos émissions de gaz à effet de serre”. Seule solution pour espérer “revenir à un climat moins excessif”.