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Toute la semaine, nous vous emmenons le long du fleuve Mississippi, du Midwest au sud américain, afin de mieux comprendre les enjeux des élections de mi-mandat qui se tiendront le 8 novembre. Dans ce cinquième et dernier épisode, notre correspondante aux États-Unis, Fanny Allard, nous conduit à la Nouvelle-Orléans, joyau de la Louisiane menacé par le changement climatique.
Construite sur des marécages au XVIIIe siècle et située à faible altitude, la Nouvelle-Orléans est l’une des villes américaines les plus exposées au changement climatique. Si la température de la planète et le niveau de la mer continuent d’augmenter, la côte lousianaise pourrait se retrouver sous l’eau. Face à ce risque, cet État, parmi les plus polluants des États-Unis, a adopté un plan climat en février dernier et a investi quatorze milliards de dollars dans des digues pour se protéger des ouragans.
“Ce n’est pas un système parfait mais ça diminue les risques”, observe le docteur Alex Kolker, professeur au marine consortium des Universités de Louisiane. “Le changement climatique rend tout le sud de la Louisiane vulnérable.”
Au total, ce sont 560 kilomètres de murs de six à huit mètres de hauteur qui encadrent la ville. Le dispositif a résisté en 2021 lors de la tempête Ida mais reste fragile. “Les digues ont constamment besoin de maintenance, expose Alex Kolker. Ici, on peut justement voir qu’une partie de la digue est en train de couler : ces deux parties ont été nivelées et il y a maintenant cinq centimètres de différence entre les deux”.
En plus des catastrophes naturelles, la Louisiane est soumise à une rapide montée des eaux. D’ici à 2050, le niveau de la mer devrait monter de soixante centimètres, selon l’Administration océanique et atmosphérique nationale.
“Si vous regardez là-bas, poursuit le docteur Alex Kolker, vous allez voir une poignée d’arbres morts. Avant, c’était une forêt de cyprès qui faisait tampon et protégeait la Nouvelle-Orléans des tempêtes, des ouragans et de l’eau.”
Recycler le verre pour reconstruire la côte
Face à cette situation, de nombreuses initiatives locales voient le jour. Une entreprise locale recycle ainsi le verre de la Nouvelle-Orléans pour le transformer en sable, dans l’espoir de reconstruire la côte. Alex Ward est le directeur des opérations de “glass half full”.
“Nous recevons environ quinze tonnes de verre par semaine, décrit-il. Tout ce qui est broyé tombe dans un entonnoir, les morceaux les plus lourds tombent directement dans un sac et c’est notre produit de sortie.”
Le sable récolté est ensuite mis dans des sacs en toile de jute qui se désagrègent au bout de 6 mois et permettent aux nouveaux matériaux de s’intégrer à l’environnement. 1 250 tonnes de verre ont déjà été recyclées par Alex et ses collègues. Mais cela ne suffit pas.
“La côte louisianaise perd l’équivalent d’un terrain de foot de terre toutes les 100 minutes, déplore l’entrepreneur. On ne peut pas remplacer ça, mais on peut ralentir l’érosion en déployant notre sable à des endroits stratégiques.”
Trois fois par semaine, les riverains viennent donc déposer leurs bouteilles. 1 000 tonnes de verre transformées en sable peuvent, bien réparties, changer la trajectoire d’un marais. L’entreprise d’Alex Ward est soutenue par plusieurs habitants.
“Il y a toujours eu des oppositions à la restauration de la côte en Louisiane, témoigne un riverain venu déposer son verre. Toute ma vie, ça a été sujet à débat, alors la voir aujourd’hui disparaître est un choc. Ces gars-là mènent le combat, moi je le fais aussi en recyclant et en allant voter.”
Le 8 novembre prochain, les Louisianais sont attendus aux urnes pour voter aux élections de mi-mandat. Mais seule la moitié des électeurs considère le climat comme l’une de ses priorités, selon un sondage Washington Post/ABC News.