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Après une année marquée par une multitude d’évènements climatiques extrêmes à travers le monde, la 27ᵉ Conférence des Nations Unies sur le Changement Climatique (COP27) s’ouvre à Charm El-Cheikh en Égypte. Alors que les pays en développement sont en première ligne face aux impacts du changement climatique, cette COP en Afrique devrait donner lieu à d’âpres négociations. Ils réclament des compensations financières pour leurs “pertes et dommages” de la part des pays riches.
Le coût croissant et inégal du changement climatique
Des centaines de milliers de morts suite aux sécheresses et aux inondations, 20 millions de personnes contraintes de quitter leur lieu de vie et une facture estimée à 329 milliards de dollars : le coût humain et financier du changement climatique est immense, et il touche plus durement les pays du Sud. Alors que les pays du G20 sont responsables de 75 % du total des émissions mondiales de gaz à effet de serre, le V20, une coalition de 55 pays vulnérables sur le plan climatique, n’en produit que 5 %. Pourtant, certains d’entre eux ont perdu plus de la moitié de leur potentiel de croissance en 20 ans à cause du réchauffement du globe. Le continent africain a été frappé par pas moins de 130 événements climatiques extrêmes au cours des deux dernières années seulement.
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Par ailleurs, les pays pauvres peinent à payer les pertes liées aux évènements climatiques, puisque leur capacité d’emprunt auprès des institutions financières est faible. Sans la confiance des marchés, ils sont réduits à contracter des prêts à des taux très élevés. “Cela modifie votre capacité d’emprunt, ce qui signifie que toute reconstruction coûte plus cher, par dollar, dans un pays en développement que dans un pays développé”, explique Sara Jane Ahmed, conseillère financière du groupe des 20 pays vulnérables (V20).
Point sensible des négociations : les “pertes et préjudices”
Les pays en développement demandent donc aux plus riches de renforcer leurs engagements en matière de soutien financier. La mise en place d’un fond appelé “Pertes et préjudices”, en cas de catastrophes liées au climat auxquelles elles ne peuvent s’adapter, est sur la table depuis des années. Mais, la plupart des pays du Nord n’en veulent pas : jusqu’à présent, seul le Danemark a promis 13 millions de dollars. “Il semblerait évidemment logique que la facture soit réglée par les responsables, selon le principe de pollueur-payeur”, affirme François Gemenne, professeur à Sciences-Po et co-auteur du dernier rapport du GIEC.
Pour lui, la défiance entre les pays du Nord et du Sud risque de se cristalliser lors de cette COP 27 : “plus les pays du Nord veulent essayer d’échapper à leur engagement, que ce soit l’engagement en matière de réduction des émissions ou des engagements financiers en matière d’adaptation, plus le ressentiment et la colère des pays du sud va être grand.”
Le retour du charbon
La question de la réduction concrète des émissions sera aussi sur la table, dans un contexte où la crise énergétique mondiale, alimentée par la guerre en Ukraine, génère de grandes tensions. Plusieurs pays européens, dont la France, reviennent au charbon malgré l’engagement pris par le continent d’éliminer complètement sa production d’ici à 2030.
Par ailleurs, de nombreux pays européens investissent dans de nouveaux projets gaziers, principalement en Afrique. L’Italie a conclu un accord avec l’Angola et la République du Congo, tandis que l’Allemagne cherche à s’approvisionner au Sénégal. Alors que l’Agence internationale de l’énergie estime que les réserves en gaz de l’Afrique pourraient remplacer à peu près un cinquième du gaz fourni par la Russie à l’Europe, certains affirment que cela mettrait en péril les objectifs climatiques mondiaux.
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Mais pour les pays africains qui, dans de nombreux cas, doivent encore sortir leur population de la pauvreté, les énergies fossiles sont l’option énergétique la moins chère et la plus accessible. “Si l’Afrique veut électrifier l’ensemble du continent rapidement, elle n’aura pas d’autre choix que de se tourner vers le gaz, comme le développement des énergies renouvelables est encore largement réservé aux pays industrialisés”, explique François Gemenne.