La découverte des ciseaux génétiques CRISPR-Cas9 a été une véritable révolution. Aujourd’hui, ils sont utilisés dans un essai clinique pour prendre en charge plusieurs types de cancers solides. Les résultats sont prometteurs !
Pour la première fois, les ciseaux génétiques CRISPR ont été utilisés lors d’un essai clinique de phase I. Seize patients atteints d’un cancer (mélanome, cancer colorectal, du poumon, du sein, de la prostate ou de l’ovaire) en impasse thérapeutique ont été inclus dans l’essai. Les globules blancs des patients ont été prélevés. Grâce aux ciseaux génétiques, des gènes d’intérêt ont été modifiés à l’intérieur des globules blancs. Puis, ceux-ci ont été réinjectés au malade. La maladie a ainsi été stabilisée chez cinq patients sur seize. Même si la réussite est partielle sur le plan clinique et que de nombreux progrès restent à accomplir, il s’agit d’une preuve du concept scientifique. Les travaux ont été publiés dans la prestigieuse revue Nature.
Qu’est-ce qu’un TCR ?
Les globules blancs prélevés chez les patients étaient des cellules T. Celles-ci ont la capacité de reconnaître les cellules malades (infectées par un virus ou devenues cancéreuses) et de les détruire. C’est grâce à une protéine située sur leur surface (un récepteur TCR) que les cellules T distinguent les cellules à détruire de celles à épargner. Le récepteur TCR se fixe à un antigène situé à la surface de la cellule suspecte. Selon la nature de l’antigène, la cellule T identifie s’il s’agit d’une cellule malade ou d’une cellule saine. Alors pourquoi les malades atteints de cancer n’arrivent-ils pas à combattre les cellules cancéreuses tout seuls ? Car les cellules T dotées du TCR capable de reconnaître les cellules cancéreuses ne sont pas assez nombreuses pour les détruire.
Modifier le TCR des cellules T
C’est là qu’interviennent les chercheurs. En prélevant un morceau de la tumeur du patient et des cellules T circulant dans le sang, ils sont en mesure de sélectionner les cellules T possédant le TCR capable de reconnaître les cellules cancéreuses. Il ne reste plus qu’à remplacer le TCR d’un grand nombre de cellules T par ce TCR fonctionnel. La technologie CRISPR-Cas9 permet cela : elle reconnaît et coupe une séquence d’ADN précise (celle du TCR qui ne fonctionne pas) puis la remplace par une autre séquence d’ADN (celle du TCR opérationnelle). Une fois cette étape réalisée, les cellules T modifiées sont injectées au patient.
Un résultat clinique encourageant
Un mois après l’injection des cellules T modifiées, les lésions cancéreuses de cinq patients étaient stables. Deux d’entre eux ont même montré une régression du cancer. Grâce à des biopsies, les auteurs de l’étude ont pu mettre en évidence que les cellules T modifiées représentaient jusqu’à 20 % des cellules immunitaires présentes à proximité de la tumeur, soit beaucoup plus que les cellules T natives. Même si des progrès sont encore nécessaires, il s’agit de résultats très encourageants. D’autant plus que la méthode est applicable à tous les types de cancers solides. La prise en charge personnalisée des cancers est à portée de main.