Des chercheurs viennent d’identifier les neurones qui, activés par stimulation électrique de la moelle épinière, ont permis à neuf patients paralysés de retrouver l’usage de leurs jambes. La cartographie moléculaire constituée à cette occasion pourrait permettre de cibler les neurones endommagés par les lésions de la moelle épinière.
Pour marcher, nous avons besoin des neurones situés dans la moelle épinière lombaire, qui sont activés en cascade descendante à partir du tronc cérébraltronc cérébral. Une lésion grave de la moelle épinièremoelle épinière peut alors perturber cette connexion cruciale entre le cerveau et les réseaux de cellules nerveuses dans la partie inférieure de la colonne vertébrale. La conséquence de la lésion est une paralysie permanente.
En 2018, des neuroscientifiques ont montré qu’une technique connue sous le nom de « stimulationstimulation électrique épiduraleépidurale » (SEE) pouvait réactiver tout de suite les neurones non fonctionnels de la moelle épinière lombaire, ce qui permet aux personnes paralysées de marcher à nouveau, en association avec un entraînement intensif. Toutefois, les principes biologiques par lesquels la SEE remodèle la moelle épinière pour restaurer la marche restaient flous.
Une stimulation électrique qui restaure la marche
Une équipe de chercheurs du centre NeuroRestore, en Suisse, rapporte aujourd’hui dans Nature que ce même type de stimulation électrique a permis de restaurer la marche et d’améliorer l’état neurologique de neuf personnes atteintes d’une lésion grave de la moelle épinière. Dans un premier essai clinique humain, les neuf participants (dont trois complètement paralysés et sans aucune sensation dans les jambes) ont participé à un entraînement en plus de recevoir l’électrostimulation délivrée par des dispositifs implantés dans leur colonne vertébrale.
Cette récupération de la marche suggère que la stimulation déclenche un remodelage des neurones spinaux. Pourtant, en visualisant de plus près l’activité de la moelle épinière chez un modèle de rongeursrongeurs, les chercheurs ont fait une découverte étonnante. « La récupération impliquait une réduction de l’activité neuronale dans la moelle épinière lombaire pendant la marche. Nous avons émis l’hypothèse que cette réduction inattendue reflète la sélection, en fonction de l’activité, de sous-populations neuronales spécifiques qui deviennent essentielles pour qu’un patient puisse marcher après une lésion de la moelle épinière », écrivent-ils.
Des neurones spécialisés dans la récupération
Dans des échantillons de tissu spinal de souris, les neuroscientifiques ont mesuré l’activité génétiquegénétique de milliers de neurones individuels, afin d’obtenir une cartographie moléculaire détaillée de la marche. Ils ont ensuite utilisé un algorithme d’apprentissage automatique pour rechercher les neurones de souris qui présentaient des changements dans l’activité génétique, similaires à ceux observés dans la rééducation à la marche chez les humains. La précision de cet atlas montre que la stimulation de la moelle épinière active un type de neurones spécifiques : les neurones Vsx2, qui ne sont pas sollicités pour la marche des personnes ne présentant pas de lésion.
Pour s’assurer de la découverte, l’équipe a inactivé ces neurones en particulier. « Chez les souris souffrant d’une lésion, cette inactivation des neurones Vsx2 a immédiatement stoppé la marche, alors qu’elle restait sans effet sur les souris saines. Ceci indique que les neurones Vsx2 sont à la fois nécessaires et suffisants pour que le traitement d’électrostimulation soit efficace et entraîne la réorganisation du système nerveux », indique un communiqué.
La constitution de cet atlas moléculaire est une avancée importante qui permettrait aux neuroscientifiques de manipuler directement l’activité de neurones spécifiques avec d’autres traitements, comme la thérapie géniquethérapie génique. D’après le neurologue Marc Ruitenberg, les thérapies à base de cellules souches pourraient, à terme, remplacer les neurones endommagés lors de lésions de la moelle épinière.