Mathieu
En tant que Terriens qui souffrent de ce qui pourrait se révéler être l’année la plus chaude de l’histoire, il y a un espoir prométhéen. L’énergie de fusion virtuellement illimitée semble être, sinon tout près, du moins à portée de main.
En décembre dernier, le Laboratoire national d’ignition du Lawrence Livermore a enfin réussi à forcer les isotopes de l’hydrogène deutérium et tritium à subir une réaction de fusion auto-entretenue. C’était une avancée encourageante, bien que pas exactement une percée. Le gain net en énergie limité du NIF n’a pas pris en compte l’énergie nécessaire pour allumer les 192 lasers ultraviolets qui ont initié la réaction. Cependant, il y a des leçons à tirer des succès et des échecs du NIF, mais la fusion par confinement inertiel basée sur les lasers ne permet pas encore une production d’énergie à grande échelle.
Il y a aussi beaucoup à apprendre de l’Iter, la plus grande expérience de fusion au monde, qui est en cours de construction dans le sud de la France. Depuis 1985, le projet réunit 35 pays et des milliers de scientifiques et d’ingénieurs. Les expériences de fusion par confinement magnétique de l’Iter se dérouleront à l’intérieur d’un dispositif en forme de donut géant appelé un tokamak, où de puissants aimants supraconducteurs forceront les isotopes de l’hydrogène à fusionner.
Même si l’Iter réussit à déclencher une réaction de fusion soutenue, il ne pourra jamais exploiter l’énergie produite. Cette étape d’ingénierie cruciale sera accomplie par un autre groupe. L’une des équipes qui souhaitent mettre l’énergie de fusion sur le marché est Commonwealth Fusion Systems, à Devens, Mass., dont les six fondateurs ont tous effectué des recherches à l’Iter. Dans “Tale of the Tape”, le rédacteur en chef Tom Clynes nous emmène à l’intérieur du projet pilote Sparc de CFS visant à créer un nouveau type de réacteur de fusion compact commercialement viable.
La conception unique de CFS repose sur des milliers de kilomètres de ruban supraconducteur à haute température, qui aideront à fournir les champs magnétiques incroyablement puissants nécessaires pour confiner le plasma surchauffé du réacteur. Comme l’explique Clynes, le successeur prévu de Sparc, Arc, comportera une couverture de sels fondus qui absorbera les neutrons rayonnés, puis les pompera à l’extérieur du tokamak pour chauffer l’eau en vapeur afin d’alimenter une turbine. De manière cruciale, le sel fondu pourrait également produire du tritium, un combustible nécessaire mais incroyablement rare pour la fusion par confinement magnétique.
Michael Koziol, Rédacteur en chef adjoint qui suit l’énergie nucléaire pour Spectrum, souligne que le tritium ne se forme généralement pas naturellement. L’Iter utilisera à lui seul une bonne partie des réserves mondiales de tritium, a expliqué Koziol, “donc l’une des questions auxquelles CFS et la plupart des startups de fusion devront répondre est : où obtenez-vous du tritium pour maintenir la réaction ?” Heureusement, le tritium peut être un sous-produit du processus de fusion, déclare Koziol, donc trouver des moyens de réintroduire le tritium produit dans le réacteur à l’aide de couvertures reproductrices ou d’autres méthodes sera à la fois une opportunité et un énorme défi à surmonter dans les années à venir.
Deux autres entreprises, Zap Energy et Helion Energy, toutes deux basées à Everett, dans l’État de Washington, visent à concurrencer CFS. Comme le souligne le rédacteur en chef Mark Harris dans son récent article en ligne “Welcome to Fusion City, USA”, ces startups “incarnent une nouvelle confiance selon laquelle l’énergie de fusion est désormais un défi d’ingénierie résoluble plutôt qu’un puzzle scientifique éternellement insaisissable”. Ce défi ne peut être relevé assez rapidement. Et avec des milliards de dollars de financement gouvernemental et d’investissement privé, ainsi que des recherches provenant de grands projets internationaux, ces entreprises offrent un véritable espoir de voir, dans les prochaines années, la technologie nécessaire pour aider le monde à se passer des combustibles fossiles, et à un rythme qui pourrait freiner les marées montantes du changement climatique.
