in

L’Europe veut son autonomie et finance une mission de démonstration inédite en orbite



La Commission européenne et Thales Alenia Space ont profité du 73e Congrès international d’astronautique pour annoncer le programme EROSS IOD, dédié aux services en orbite. Ce programme a pour objectif de valider, au travers d’une première mission européenne de démonstration prévue d’ici à 2026, les technologies nécessaires aux futures opérations robotisées d’assistance en orbite. Les explications de Sabrina Andiappane, responsable de l’activité services en orbite chez Thales Alenia Space.

Les progrès technologiques en matière d’autonomie et de robotique sont à l’origine du développement de services aux satellites en orbite (On-Orbit Servicing). Ces activités de maintenance et de logistique sont destinées à soutenir l’exploitation des satellites directement en orbite, afin d’étendre leur durée de vie opérationnelle et d’offrir de nouvelles possibilités en gestion de flotte pour les opérateurs de satellites. Dans un avenir proche, elles seront également utilisées pour la désorbitation des satellites en fin de vie et la gestion des débris spatiaux. Les véhicules spatiaux de service en orbite représentent un véritable changement de paradigme pour le secteur spatial : les futurs systèmes pourront être entretenus en orbite et continuer d’évoluer dans le temps. Les satellites du futur pourront ainsi être conçus d’une manière complètement différente et adaptée pour pouvoir évoluer dans le temps.

C’est dans ce contexte et afin de promouvoir le développement de la maintenance satellitaire et soutenir l’industrie européenne des services en orbite que la Commission européenne a donné le coup d’envoi au programme dédié aux services en orbite EROSS IOD (European Robotic Orbital Support Services In Orbit Demonstrator). Ce programme sera réalisé par Thales Alenia Space, responsable d’un consortium constitué de 17 entreprises européennes. Il a pour objectif de « valider, au travers dune première mission européenne de démonstration prévue dici à 2026, les technologies nécessaires aux futures opérations robotisées dassistance en orbite, telles que le rendez-vous, la capture, larrimage, le ravitaillement et l’échange de charges utiles dun satellite », nous explique Sabrina Andiappane, responsable de l’activité services en orbite chez Thales Alenia Space. « L’objectif étant qu’après la mission de démonstration le véhicule de services en orbite soit disponible pour des futurs clients. »

Services aux satellites en orbite : l’Europe a besoin d’un véhicule de deuxième génération

L’idée est de sauter l’étape du « remorqueur spatial (space tug) et de se concentrer sur un véhicule plus évolué, capable d’interagir avec le satellite cible ». Concrètement, la mission prévoit de lancer deux satellites : « un “servicer” de 500 kg à 1 tonne et un satellite “client” de 300 kg ». Parmi les technologies nécessaires pour la mission, Thales Alenia Space « développera entre autres des capteurs et senseurs ainsi qu’un système de Guidage, Navigation et Contrôle (GNC) permettant de se rapprocher du satellite ciblé en toute autonomie ». Le servicer (dépanneur de l’espace) sera équipé d’un « système robotique composé d’un bras et de pinces de capture permettant dintercepter notre cible en orbite, fourni par l’Institut DLR ». Quant au satellite cible, il « simulera un satellite non préparé pour du service en orbite et un satellite préparé doté d’interfaces damarrage, de ravitaillement et de connexion de données et puissance ».

Le saviez-vous ?

En février 2020, le remorqueur spatial MEV-1 et le satellite Intelsat 901 ont ouvert une nouvelle ère de l’exploitation commerciale des satellites en démontrant qu’il était possible de prolonger la durée de vie des satellites, bien qu’ils n’aient pas été conçus pour subir des opérations de service.

Les deux satellites réaliseront une série « d’activités de maintenance et de service de façon à démontrer ce qu’il est possible de faire avec ces deux configurations ». Avec le « satellite non préparé », le servicer démontrera sa capacité à l’attraper à différents endroits tandis qu’avec le « satellite préparé », il montrera qu’il est possible de réaliser des « services plus avancés comme le ravitaillement et l’installation de charge additionnelle permettant une augmentation de certaines performances, voire aussi l’ajout de certaines fonctionnalités ». Cette charge utile qui sera transférée et mise en service sur le satellite cible, fait « l’objet d’un appel à idées émis par la Commission européenne ». Différentes charges sont possibles comme, par exemple, une caméra, un instrument, voire une démonstration technologique.

Incertitude sur le choix de l’orbite

Cette mission sera réalisée soit en orbite basse, soit en orbite géostationnaire. « Ce point fait encore débat ». Si les opérateurs de satellites de télécommunications en orbite géostationnaire ont un intérêt commercial évident à prolonger la durée de vie de leur satellite, en orbite basse le marché de la maintenance aux satellites pourrait être freiné par la multitude de satellites petits, peu coûteux et jetables des constellations, mais il y a les satellites d’observation institutionnels qui sont des clients comme les satellites commerciaux.

Le servicer restera en orbite une dizaine d’années de façon à fournir ses services à des clients commerciaux

Pour comprendre l’incertitude sur le choix de l’orbite, il faut savoir qu’à l’issue de sa mission de démonstration, le « servicer restera en orbite une dizaine d’années de façon à fournir ses services à des clients commerciaux qui souhaiteraient augmenter la durée de vie de leur satellite ou le désorbiter ». Si le marché du servicer se trouve principalement à 36.000 kilomètres de la Terre, il y a donc un intérêt que la mission de démonstration soit réalisée sur cette orbite. « Nous prendrons une décision sur le choix du lieu de la mission avec la Commission européenne d’ici la fin de l’année. »

La maintenance des satellites en orbite pourrait être une force de dissuasion spatiale

La fin de la mission du servicer « diffère selon qu’il se trouve sur une orbite basse ou géostationnaire ». S’il se trouve à quelques centaines de kilomètres de la Terre, « il sera désorbité ». A contrario, s’il se trouve sur une orbite géostationnaire, il sera « mis sur une orbite parking ou rejoindra le cimetière des satellites géostationnaires ». Quant au satellite cible, à la fin de sa mission, il sera « désorbiter par le servicer ».

Cette mission pionnière pourrait ouvrir la voie à « une flotte de satellites de services en orbite plus évoluée que les remorqueurs spatiaux de la première génération ». Elle devrait également pousser les constructeurs de satellites à tenir compte de ses avancées technologiques et préparer leur satellite en conséquence en les « dotant d’interfaces d’amarrage et de ravitaillement, et de connexion de données et puissance pour ajouter des charges utiles ». Cette mission ouvre la voie aux futures missions robotiques d’exploration qui pourront avoir lieu autour de la Lune en imaginant des systèmes évolutifs grâce à la robotique spatiale.

What do you think?

Written by Stephanie

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

la Belgique veut frapper plus fort que l’Europe

« Yvon Chouinard pose la question de la propriété et de la transmission des entreprises et celle de leur contribution au bien commun »