C’est l’histoire d’une poignée d’habitants de la ville de Mulhouse, excédés par la présence de rats aux abords des squares de leur quartier et malheureux de devoir jeter leur pain sec à la poubelle. Pour éviter le nourrissage des animaux dans l’espace public et lutter contre le gaspillage alimentaire, ils ont lancé au sein du conseil participatif de leur secteur un projet de collecte de pain rassis. Quatre conteneurs sont installés, depuis la fin du mois de juin, dans des lieux du quartier connus pour faire l’objet de dépôts sauvages. Les volumes récoltés sont mis à disposition d’exploitations agricoles alentour.
L’installation a été prise en charge par la ville, dans le cadre du budget alloué au développement de la démocratie participative. Ce sont aussi les agents municipaux qui vident régulièrement les conteneurs et effectuent un premier tri, pour ne garder que le pain encore consommable par les animaux. Mais l’implication de la municipalité s’arrête là.
Victime de son succès
Ce sont les habitants eux-mêmes qui ont réfléchi au type de contenant à mettre à disposition du public – des petits conteneurs de collecte munis de bacs à roulettes, pour faciliter le ramassage du pain. Les mêmes ont imaginé leur habillage, avec l’aide d’une agence de communication, pour inciter les résidents du quartier Manufactures à s’approprier ce nouveau geste de tri. Chacun a ensuite démarché amis et connaissances pour trouver un premier exploitant agricole prêt à valoriser cette collecte quelque peu particulière.
« Les collectivités n’avaient pas de réponse pour faire face à la problématique. Le projet est vraiment parti des habitants et s’est fait avec eux », confirme David Malas, président du conseil participatif de ce quartier bigarré. Soucieux de ne pas voir leurs efforts récupérés à des fins politiques, les membres du conseil ont d’ailleurs préféré geler le projet à la veille des élections municipales, alors que les conteneurs étaient déjà prêts. « Ensuite, c’est [la pandémie de] Covid-19 qui nous a empêchés de nous réunir, indique un représentant des habitants. Au redémarrage des instances participatives, au printemps, ce projet était donc le premier sur la liste. »
« Les projets lancés dans le cadre de la démocratie participative ont habituellement une dimension ludique. Celui-ci est différent, parce qu’il intègre une connotation environnementale et un vrai engagement citoyen », reconnaît Florian Colom, l’élu référent du quartier. A peine lancé, le dispositif est d’ailleurs victime de son succès. Avec des bacs remplis en quelques jours et une première collecte composée à plus de 40 % de produits consommables par les animaux, l’initiative a permis de recueillir plus de pain que ce qui était envisagé. Trop, en tout cas, pour être absorbé par une seule exploitation agricole. « Quand on a lancé ce projet, on n’avait aucune idée des volumes concernés. Nous ne sommes que des habitants bénévoles, on n’avait pas les moyens de faire des études et des recherches. Désormais, notre principal défi est de trouver des personnes prêtes à valoriser ce pain rassis. Les volumes en jeu sont énormes », confie David Malas.
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