L’injonction de la première ministre aux Rencontres des entrepreneurs de France du Medef, lundi 29 août, résonnait comme l’écho du discours de son lointain prédécesseur Pierre Messmer, lors du choc pétrolier de 1973, quand le prix du brut avait quadruplé : modérez votre consommation d’énergie. Elisabeth Borne a invité les entreprises à s’inscrire dans une trajectoire de baisse de 10 %, objectif que le chef de l’Etat, Emmanuel Macron, avait fixé à 2024 dans son interview télévisée du 14 juillet. Cet effort est le gage, selon le gouvernement, d’une période hivernale sans rationnement ni coupures brutales.
Geoffroy Roux de Bézieux, président du Medef, a estimé que l’objectif de 10 %, qui n’est « pas impossible » à atteindre rapidement même s’il est très ambitieux, est « absolument indispensable » pour éviter le rationnement ou les délestages. Les entreprises, rarement couvertes en totalité par des contrats d’approvisionnement à long terme, y sont incitées par les prix exorbitants des diverses énergies : le gaz a atteint 350 euros le mégawattheure (MWh) pour 2023, poussé par la menace russe d’une fermeture totale de ses gazoducs ; l’électricité pour 2023 aussi a dépassé les 1 000 euros le MWh en fin de semaine, vingt fois plus que début 2021 ; le baril de Brent de la mer du Nord est remonté à 105 dollars.
Mme Borne a surtout souligné les menaces pesant sur l’approvisionnement gazier, même si les stocks pour l’hiver sont désormais reconstitués à 90 %, se rapprochant de l’objectif de 100 % début novembre fixé par le gouvernement. Ce qui n’empêchera pas les industriels de devoir faire un effort de sobriété. En juillet, la Commission européenne avait fixé un cadre général aux Vingt-Sept, chaque Etat membre devant réduire sa consommation de gaz de 15 % entre août 2022 et mars 2023. Rien de tel pour l’électricité.
Or c’est le prix de l’électricité qui est « le principal sujet de préoccupation » du Medef – en raison du prix, de l’arrêt de 32 des 56 réacteurs nucléaires d’EDF et d’une production hydroélectrique réduite par la sécheresse. Pour les chefs d’entreprise, il faut d’abord passer l’hiver 2023. Tous les secteurs ne sont pas aussi exposés. Les usines électro-intensives (aluminium, chlore, acier, papier-carton, ciment, verre…), qui représentent 70 % de la demande d’électricité de l’industrie, sont dans une situation sans précédent, alors qu’elle peut représenter de 15 % à 50 % des coûts de production. La grande distribution, gourmande en énergie pour maintenir sa chaîne de froid, va éteindre des enseignes lumineuses.
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