Presque un an et demi après son atterrissage sur Mars le 18 février 2021, dans le cratère Jezero, le rover Perseverance de la NASA a déjà parcouru plus de 12 kilomètres à la surface de la Planète rouge, pris plus de 300 000 images et lancé quantité d’analyses. Quelques résultats ont déjà été dévoilés, comme les premiers sons martiens ou la confirmation que Jezero avait bien accueilli autrefois un lac grand comme le Léman, mais on attendait plus. Notamment sur la géologie de la région, supposée avoir été propice à une éventuelle apparition de la vie, à l’époque lointaine où Mars n’était pas l’astre aride et froid qu’il est devenu. Cette attente a pris fin le 25 août avec la parution simultanée, dans les revues Science et Science Advances, de quatre études concernant le sous-sol martien.
« C’est le premier paquet de publications géologiques, résume Sylvestre Maurice, astrophysicien à l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie, dont l’équipe a fourni l’instrument SuperCam de Perseverance, et coauteur de deux de ces études. Les instruments tous ensemble rendent leur verdict. » Et ce verdict est avant tout celui d’une surprise. « La lecture des résultats nous a étonnés, poursuit le chercheur français : Mars a de l’imagination, en ce sens où les paradigmes terrestres ne fonctionnent pas nécessairement sur cette autre planète. »
« C’est l’expression d’une géologie différente de ce qui se passe sur notre planète » Sylvestre Maurice, astrophysicien
En ce fond de cratère qui fut jadis (il y a 3,4 à 3,7 milliards d’années) recouvert par un lac, les planétologues s’attendaient en effet à voir des roches sédimentaires. C’est raté : Perseverance a détecté des roches magmatiques contenant de l’olivine, minéral que, sur Terre, on trouve en abondance dans le manteau. Sur notre planète, on supposerait que ces roches formées en profondeur sont remontées à la surface en profitant de la tectonique des plaques. Facile. L’ennui, souligne Sylvestre Maurice, « c’est qu’il n’y a pas de tectonique des plaques sur Mars ».
Les géologues doivent donc imaginer d’autres scénarios, sur des durées interminables, avec d’importantes phases d’érosion décapant les couches de surface et révélant les roches enfouies. « Cela trahit une histoire longue et compliquée, explique Sylvestre Maurice, c’est l’expression d’une géologie différente de ce qui se passe sur notre planète. Et cela fait du bien de sortir de cette boîte qu’est la Terre, pour nous montrer qu’il existe d’autres possibilités. »
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