Le dessin présente un pub traditionnel britannique bondé, rempli de clients en pleine discussion. Mais le tenancier s’agace, dans un cri du cœur : « Je suis content que vous soyez tous venus profiter de notre chauffage, mais est-ce que vous pourriez acheter à boire ? » La caricature, signée Matt, l’excellent dessinateur du Daily Telegraph, résume l’atmosphère qui règne au Royaume-Uni. Avec des factures de gaz et d’électricité qui vont augmenter de 80 % en octobre, après une première hausse de 54 % en avril, les Britanniques font face à un violent choc tarifaire. Pour un foyer moyen, les factures vont atteindre 3 550 livres par an (3 880 euros), presque un triplement sur un an. De quoi éteindre le chauffage chez soi et filer au pub…
Et encore, les tarifs des ménages sont encadrés par le régulateur. Ce n’est pas le cas pour les entreprises, dont le coût de l’énergie est en train de s’envoler. Les pubs, institution britannique, sont parmi les plus exposés. Six grandes chaînes (Greene King, Admiral Taverns, JW Lees, Carlsberg Marston’s, Drake & Morgan et St Austell Brewery) viennent de tirer la sonnette d’alarme dans une lettre ouverte écrite ensemble : « Les hausses des tarifs [d’énergie] peuvent atteindre 300 % par rapport à avant la pandémie, avec une moyenne de 150 % dans le secteur des pubs et des activités brassicoles, ce qui met en danger les emplois et les entreprises », expliquent-elles.
Quelques mois de sursis
Tim Martin est à la tête de Wetherspoon, une chaîne qui comprend un millier de pubs. S’il n’est pas signataire de la lettre, il fait face au même choc énergétique. « En moyenne, nos pubs ont une facture d’électricité et de gaz de 65 000 livres [75 000 euros] par an, précise-t-il. Nous avions négocié un contrat avant la hausse actuelle et ils nous restent donc quelques mois avant que les prix n’augmentent. Mais on estime qu’on va faire face à des envolées de 50 % à 100 % dans les prochains mois. » Or, en moyenne, chaque pub réalisait – avant la pandémie – un bénéfice annuel de 120 000 livres [139 000 euros]. « Si les prix doublent, on parle d’une réduction de la moitié de nos bénéfices. »
Bien sûr, il n’est pas question de rester les bras ballants. Il est possible d’éteindre quelques lumières, de réduire un peu le chauffage, de trouver des économies d’énergie. Pour Wetherspoon, une chaîne de pubs très populaire auprès des petites classes moyennes britanniques, avec ses menus abordables et son bon accueil pour les familles, et qui dégageait 100 millions de livres de bénéfices prépandémie, le choc est absorbable. « J’étais bien plus inquiet au moment des confinements, ajoute M. Martin. La situation est difficile, mais les problèmes peuvent être surmontés. »
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