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Un des premiers écologistes québécois dénonce les «éco-vedettes»


Entouré de ses chiens, sur sa terre à Frampton, en Beauce, l’environnementaliste André Bélisle n’a rien perdu de son côté franc-tireur. Lui qui a été de tous les combats, des pluies acides aux gaz de schiste jusqu’à la Fonderie Horne, dénonce maintenant les nouveaux écolos, ceux qu’il juge proches du gouvernement et des pétrolières. 

« Je les appelle les éco-vedettes, ils peuvent dire n’importe quoi pour de l’argent », lance Bélisle, président de l’Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA), qui souligne cette année ses 40 ans. 

Le Journal le rencontre dans son fief, au cœur des Appalaches. Autour de sa maison, l’environnementaliste prend soin de 100 000 arbres. 

Actif dans sa communauté

Au loin, une éolienne tourne sans relâche sur son terrain. C’est grâce à son initiative qu’un parc de 11 éoliennes a été implanté avec la participation des citoyens. 

« On était le pichou du comté, maintenant on est la belle à marier ! Frampton a vu son budget passer de 800 000 dollars à 1,6 million de dollars, ça fait toute la différence », lance-t-il. 


André Belisle, environnementaliste

Mais même loin de l’action de Montréal, Québec ou Ottawa, André Bélisle garde le feu sacré. 

Guilbeault, pas un écolo ? 

Et il n’hésite pas à tirer à boulets rouges sur le ministre fédéral de l’Environnement, Steven Guilbeault, dans un livre à paraître à l’automne, Sur les ailes de l’aigle

« La seule chose [dont] les gens se souviennent, c’est qu’il est monté sur la tour du CN. Il n’avait rien fait d’autre. C’est un faux. Un de mes amis au gouvernement m’avait déjà dit : il faut que tu te mettes dans la tête que Guilbeault, c’est un plan de communication. C’est pas un écolo », lance-t-il, sans concession.


Steven Guilbeault, ministre fédéral de l’Environnement

Photo d’Archives, Stevens LeBlanc

Steven Guilbeault, ministre fédéral de l’Environnement

 

« Dans le Suroît, le Québec en entier était contre et lui, il tergiversait. Sur Rabaska ? L’ancien ministre de l’Environnement, Thomas Mulcair, disait que c’était dangereux et lui, il signait une lettre pour dire que ce serait peut-être bon. J’ai toujours été surpris que les médias ne posent pas plus de questions », poursuit Bélisle. 

Il se défend d’avoir une animosité envers le ministre fédéral. 

« Non, ce n’est pas vrai. C’est simple, je ne ménagerai pas mes mots pour protéger quelqu’un qui nuit. » 

Le Journal a tenté d’obtenir des commentaires de M. Guilbeault, sans succès. 

Bélisle ne ménage pas non plus l’ancienne organisation du ministre, Équiterre, qui serait, selon lui, trop proche des gouvernements, un repaire de « faux écolos ». 

« Ce sont eux qui reçoivent le plus d’argent de tous les groupes au Québec. C’est dans un autre monde, ça ne se compare pas. Quand ils font une soirée, tous les notables sont là. » 

Équiterre se défend

Contacté par Le Journal, Équiterre affirme que « l’information véhiculée est erronée ».

« Notre financement vient principalement des dons de nos membres et des sympathisants. Nous recevons également du financement […] de la part de fondations et de sources gouvernementales, ce qui ne limite aucunement […] notre indépendance », a souligné par courriel le directeur des relations gouvernementales, Marc-André Viau. 

Énorme contraste de budget 

En comparaison, l’AQLPA fonctionne avec un budget annuel de 15 000 $, sans aucun argent public, laissant entrevoir un avenir sombre. Auparavant, l’organisation gérait Faites de l’air, un programme de recyclage de vieux véhicules, mais qui a été déconnecté par le gouvernement en 2014. 

« On est trois bénévoles à temps plein, notamment André et moi. On fait de tout. Je réponds au téléphone, aux courriels. On est moins gros, mais on est encore là », dit sa conjointe Jocelyne Lachapelle. 

Bélisle croit qu’il a perdu son financement public en raison de ses prises de position contre les gaz de schiste ou sur le fait que Québec n’a jamais atteint les objectifs de l’Accord de Kyoto. 

Des bâtons dans les roues

« On nous a mis les bâtons dans les roues. On a questionné le gouvernement sur le Fonds vert. On nous avait dit : on n’a plus d’argent ! Vous avez mis 800 millions dans le Fonds, mais où est allé l’argent ? » se demande-t-il. 

« La réponse qu’on a eue a été de se faire couper. Même une fonctionnaire nous a dit : on va vous donner 300 000 $, fermez tout, on vous paye les dettes », rapporte Jocelyne. 

Dernièrement, on a vu Bélisle commenter et expliquer le dossier de la Fonderie Horne, un autre dossier controversé. Mais il affirme qu’il ne va pas se taire. 

« On veut tasser les vieux de la vieille. Mais moi, je trouve que c’est important que je reste là. Je suis un empêcheur de danser en rond », dit-il, souriant.  

L’environnementaliste André Bélisle s’est retrouvé au cœur des batailles environnementales en s’opposant au port méthanier Rabaska ou à l’oléoduc Énergie Est. Il a aussi réclamé et obtenu un débat sur l’énergie au Québec. Mais d’autres grands dossiers ont aussi occupé l’environnementaliste lors des 40 dernières années. 

Les pluies acides

Bélisle est aux premières loges de tout le débat entourant les pluies acides dans les années 1980. Une pollution qui affectait les lacs, les rivières et la santé des citoyens. 

« Les gens l’ont oublié, mais c’est le Québec qui a fait virer l’Amérique du Nord. Il y a eu une campagne d’éducation populaire comme on n’en avait jamais eu. On était partout », raconte-t-il. 

Le ministre québécois de l’Environnement de l’époque, Clifford Lincoln, et le premier ministre Brian Mulroney (avec une certaine Elizabeth May qui travaillait dans son cabinet) s’accordent sur le dossier, et une entente est signée lors du sommet des Irlandais avec Ronald Reagan.  

Le Suroît

Une bataille est menée par les organisations environnementales contre les centrales au gaz que le PDG d’Hydro-Québec, André Caillé, veut implanter au Québec.

Le plan est de construire 12 centrales. Seulement pour celle du Suroît, il a été calculé qu’il y aurait une augmentation de 3 % des émissions de gaz à effet de serre, l’équivalant de 600 000 voitures. 

« Mais grâce à la mobilisation citoyenne, ils ont reculé. On en a échappé une, celle de Bécancour. On verse encore des montants à TransCanada pour quelque chose qu’on n’avait pas besoin », explique Bélisle. 

Gaz de schiste

Au tournant des années 2010, le gouvernement de Jean Charest appuie l’exploration et l’exploitation des gaz de schiste. L’industrie prévoit même forer 20 000 puits notamment dans la vallée du Saint-Laurent. 

« On a lancé un appel pour mobiliser les gens. Car on savait que le forage était un problème majeur », se souvient Bélisle. 

« La logique, on nous disait qu’on deviendrait riche avec ce gaz-là. Attends un peu. Ce gaz-là appartient à des compagnies albertaines. Vont-elles nous le donner ? Non, on ne deviendra pas riche. On n’en avait pas besoin, on a de l’hydroélectricité, l’éolien, le solaire », lance-t-il. 

Après l’opposition citoyenne et de nombreuses réserves du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE), le gouvernement abandonne l’implantation de cette industrie. 

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Written by Stephanie

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