Mathilde Cormery, jeune femme de 24 ans souffrant d’infirmité motrice cérébrale, n’a pas pu descendre de son appartement pendant près d’une semaine. Le bailleur social affirme ne pas avoir trace de ses appels.
Mathilde Cormery vient de passer près d’une semaine coincée chez elle. La jeune femme souffre depuis sa naissance d’infirmité motrice cérébrale, aussi appelée “paralysie cérébrale”. D’habitude, elle est assez autonome grâce à son fauteuil roulant électrique. Mais en septembre, il a suffi d’une panne d’ascenseur pour que son quotidien soit bouleversé.
Celle qui habite à Talent, une commune de la Côte-d’Or, vit avec sa mère au premier étage d’un immeuble. Son ascenseur est tombé en panne le jeudi 15 septembre, et a été remis en marche le jeudi 22. Sa mère travaillant la journée, elle ne peut pas la porter dans les escaliers pour que Mathilde parte vaquer à ses occupations.
“J’ai appelé plusieurs fois le bailleur social, Orvitis, sans réponse. Ils m’ont répondu aujourd’hui à cause de l’article” paru dans Le Bien public jeudi soir sur sa situation, affirme-t-elle à BFMTV ce vendredi.
Orvitis, contacté par BFMTV.com, affirme ne pas avoir de trace de ces appels. Sinon, le bailleur social assure qu’il aurait fait appel à des associations ou au centre d’action sociale de la commune pour aider la jeune femme de 24 ans.
Un isolement social et professionnel
Pour Mathilde, un ascenseur en panne entraîne des difficultés à plusieurs niveaux. Elle est actuellement étudiante en apprentissage au sein de l’association DFCO Foot Fauteuil, qui organise des sessions de football pour les personnes en fauteuil roulant. Pour ces 10 jours, son employeur a accepté qu’elle fasse du télétravail.
“Mais il y a plusieurs séances de sensibilisation dans des établissements scolaires que je n’ai pas pu faire et ça peut me porter préjudice. J’ai peur d’avoir des lacunes”, explique-t-elle.
Ne pas pouvoir voir ses collègues, mais aussi ses amis, qui sont pour la plupart en fauteuil roulant, crée également de “l’isolement social”, dénonce-t-elle.
D’autant plus que ce problème est récurent. Selon l’étudiante, à peu près tous les ans, depuis 2017, son ascenseur reste en panne pendant environ 10 jours. Orvitis reconnaît avoir “des difficultés avec l’ascenseur de ce bâtiment”, lié à l’usure et à certaines dégradations. Dans le cas de la panne récente, le délai de réparation est lié à la commande d’une pièce en rupture de stocks qui a mis plusieurs jours à arriver.
L’ascenseur est actuellement sous la surveillance de la société de maintenance responsable de l’appareil. L’entreprise dit comprendre “l’inconfort et la difficulté” ressentis par Mathilde et déclare que “ne pas pouvoir se déplacer pendant 6 jours ne doit pas arriver”.
La jeune femme affirme également qu’une des fois où elle a appelé Orvitis, la personne au standard lui a répondu: “vous êtes handicapée, donc vous n’avez pas besoin de sortir de chez vous”. “C’est de la maltraitance sociale”, dénonce-t-elle. De son côté, le bailleur social “n’ose même pas imaginer que cela puisse arriver” car son service de relations clients est “professionnel”. L’entreprise va étudier la question.
La moitié des bâtiments ouverts au public inaccessibles aux personnes handicapées
“Si j’alerte l’opinion publique, c’est que ça n’arrive pas qu’à moi ce genre d’histoire”, souligne Mathilde.
Stéphane Lenoir, coordinateur au Collectif Handicaps, qui regroupe 52 associations nationales de personnes en situation de handicap et de leurs familles, lui donne raison. “On a des retours réguliers sur des pannes d’ascenseur”, explique-t-il à BFMTV.com.
“De manière générale, il est inadmissible qu’une personne soit bloquée chez elle à cause d’une panne d’ascenseur. Il faut que les bailleurs sociaux mettent en œuvre leur contrat de maintenance et qu’ils ne se renvoient pas la balle avec la société de maintenance”, déclare-t-il.
Mais, régulièrement dans la société, des personnes en situation de handicap sont confrontées à des problèmes d’accessibilité, que ce soit dans leur immeuble, à la gare ou dans un petit commerce, souligne Stéphane Lenoir.
De fait, selon les chiffres donnés par la France à l’ONU en août 2021, sur environ deux millions de bâtiments ouverts au public en France, un million seulement sont accessibles aux personnes handicapées. Parmi les gares ferroviaires, seules 45% remplissent les critères d’accessibilité.