Il ne fait pas bon vivre au Brésil pour les défenseurs de l’environnement. Quelque 342 personnes y ont payé de leur vie ce combat entre 2012 et 2021, selon le dernier rapport de l’ONG britannique Global Witness, publié jeudi 29 septembre : un record mondial. Triste classement que la Colombie, les Philippines, le Mexique et le Honduras viennent ensuite compléter. Dans le monde, ce sont en tout 1 733 personnes qui ont été tuées pour avoir lutté contre la déforestation, l’agro-industrie consommatrice de terres ou contre les barrages lors de la dernière décennie.
En 2021, « plus des trois quarts » des 200 attaques enregistrées sur une année – en légère baisse comparé à 2020 – ont eu lieu en Amérique latine, détaillent les auteurs du rapport. « Cela tient principalement au fait que les projets d’extraction des ressources naturelles se développent sans concertation et ont lieu sur des territoires en première ligne face à la crise climatique », décrypte Ali Hines, sa principale autrice. C’est particulièrement le cas au Mexique (54), en Colombie (33) et au Brésil (26), où plus de la moitié des attaques de 2021 ont eu lieu. « Le problème est mondial. Mais les pays du Sud sont principalement concernés car le niveau de corruption est plus élevé et les conditions d’accès et de propriété aux terres plus inégalitaires », précise-t-elle.
« En ce sens, la situation au Brésil, où les conflits liés aux droits fonciers et forestiers sont la principale cause des attaques mortelles, illustre parfaitement bien ce qui se passe à l’échelle du monde, et en particulier de la région », poursuit l’experte. Jacobo Grajales, professeur de sciences politiques à l’université de Lille, spécialiste des conflits armés en Amérique latine, développe : « Il faut bien avoir en tête qu’en Amérique centrale et du Sud, les violences à l’égard des défenseurs de l’environnement sont à rattacher à une longue histoire d’appropriation des terres qui remonte à la colonisation. »
Il existe également dans ces pays « une forme de violence généralisée », poursuit le chercheur, avec, précise-t-il, « des intérêts économiques en jeu énormes, des relais politiques haut placés et une frontière entre activité légale et illégale poreuse ». Ainsi de la Colombie, le pays le plus meurtrier pour les écologistes en 2020, et qui reste, en 2021, l’un des endroits les plus dangereux au monde pour ces militants, avec 33 personnes tuées.
Global Witness pointe que plus de cinq ans après la signature de l’accord de paix entre le gouvernement et les Forces armées révolutionnaires (FARC), les résultats ne sont toujours « pas à la hauteur » – les militants écologistes étant parfois seuls à défendre des écosystèmes convoités par des groupes armés pour la culture de coca, ces derniers n’étant pas découragés par les autorités. La corruption est également très forte au Mexique, où quatre des douze massacres comptabilisés en 2021 ont été recensés.
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