Six députés de la Nupes ont déposé un amendement afin que les acteurs du streaming musical tels que Spotify ou Deezer reversent une partie de leurs revenus au Centre national de la musique (CNM).
1,5%. C’est la part des revenus que les plateformes de streaming musical devraient reverser pour soutenir la création. Du moins selon un amendement au projet de loi de finances déposé le 30 septembre par six députés du groupe “Gauche démocrate et républicaine – Nupes”.
Avec une telle taxe, qui reprend les travaux de l’Union des producteurs phonographiques français indépendants (UPFI), les entreprises telles que Spotify ou Deezer seraient contraintes de financer le Centre national de la musique (CNM). Cet établissement public créé en 2020 vise à garantir la diversité de l’industrie musicale française, gérer un observatoire de l’économie et des données de l’ensemble du secteur, mais aussi soutenir la création. Prévue pour entrer en vigueur au 1er janvier 2023, cette taxe reste pour l’heure soumise au vote des assemblées parlementaires.
Reprendre le modèle de la taxe “YouTube”
Ce nouveau biais de financement permettrait de redresser l’économie du CNM qui a vu la taxe sur la billetterie fondre (environ 30 millions d’euros attendus pour 2023 contre 35 millions en 2019), tout comme l’aide des organismes de gestion collective des droits (évaluée à 7 millions d’euros puis ramenée à 1,5 millions). Le CNM s’appuie également sur une subvention de l’État de 26 millions d’euros pour couvrir ses frais de fonctionnement. Selon l’amendement déposé, cette taxe sur les locations de phonogrammes et de vidéomusiques pourrait rapporter 21 millions d’euros.
Le syndicat national du spectacle musical et de variété, Prodiss, plaide “en faveur de l’instauration d’une contribution de l’écosystème de la diffusion numérique au financement de la diversité musicale”. D’après Politico, qui a décrypté le lobbying ayant mené au dépôt de l’amendement, la taxe reprendrait le modèle de la “taxe YouTube” adoptée en 2016, également appelée taxe “Netflix”, pour financer le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC).
“Une contribution très faible, de l’ordre de 1,5%, pourrait suffire à compléter le schéma de financement du CNM sans perturber les modèles économiques (des acteurs du streaming musical, ndlr)”, explique Prodiss dans un communiqué.
Trop tôt pour une taxe sur le streaming musical
Mais selon le vice-président chargé des relations avec l’industrie musicale et les institutions de Deezer, Ludovic Pouilly, la mise en place de cette taxe bénéficierait aux entreprises américaines, indique-t-il à Politico. Il rappelle que les acteurs européens – comme le suédois Spotify ou le français Deezer – ne sont pas encore rentables. Cette taxe devrait ainsi être répercutée sur les consommateurs.
“Augmenter nos tarifs servirait les intérêts d’autres plateformes sur le marché, et en particulier [Google, Facebook, Amazon et Apple], assure Ludovic Pouilly à Politico. Ils peuvent s’acquitter de la taxe car la musique n’est pas leur principale source de revenus, ils peuvent se permettre de ne pas payer ou de l’absorber.”
Pour lui, il est trop tôt pour parler d’une taxe sur le streaming musical. Ludovic Pouilly serait davantage enclin à un élargissement de la taxe “YouTube” comme le propose le syndicat national de l’édition phonographique (SNEP). Lors des résultats semestriels du SNEP, publiés le 27 septembre, son directeur général Alexandre Lasch s’est positionné contre la proposition d’une taxe pour le streaming musical. “Notre vigilance s’attachera particulièrement au respect par le gouvernement de son engagement de ne pas créer de nouvelle taxe”, prévient-il.