Quand, en mars 2020, l’Europe tout entière s’était confinée pour éviter les ravages du Covid-19, l’Allemagne avait d’abord fait cavalier seul, fermant ses frontières puis achetant masques et vaccins sans se préoccuper de ses partenaires communautaires. Finalement, Angela Merkel, encore chancelière à l’époque, était rentrée dans le rang et avait fait équipe avec le président français, Emmanuel Macron, pour défendre un plan de relance européen, financé par une dette commune aux Etats membres de l’Union européenne (UE), et l’achat en commun de vaccins.
Aujourd’hui, Berlin est de nouveau saisi par la tentation du chacun pour soi, tant la flambée des prix du gaz et de l’électricité panique ses décideurs économiques et politiques. Son plan de 200 milliards d’euros, dévoilé le 29 septembre et destiné à alléger la facture énergétique des citoyens et des entreprises allemands, en atteste. D’ailleurs, le chancelier, Olaf Scholz, n’a pris la peine de prévenir ni l’Elysée ni la Commission européenne. Lundi 3 et mardi 4 octobre, certains des ministres des finances des Vingt-Sept, qui se réunissaient à Luxembourg, s’en sont émus, évoquant le risque de désintégration qui en découle pour l’UE.
Alors que les taux d’intérêt ont déjà commencé à diverger au sein de la zone euro, le plan allemand offre sans conteste un avantage à ses acteurs économiques, et menace l’intégrité du marché intérieur. « Il est indispensable que nous fassions les choses ensemble en Europe face à une crise énergétique qui va durer. (…) Sinon, nous risquons la fragmentation de la zone euro », a ainsi lancé Bruno Le Maire, le ministre français de l’économie, lundi, à Luxembourg. Dans les coulisses, certains évoquent aussi la « duplicité » de Berlin.
Trouver des « outils mutualisés »
D’un côté, ce plan subventionne le prix du gaz pour les Allemands, et aura donc pour conséquence d’en encourager la consommation ; de l’autre, l’Allemagne s’oppose à la mise en place d’un plafond sur le prix du gaz au niveau communautaire, que réclament quinze Etats membres, arguant que cela risquerait de faire remonter la demande énergétique des Vingt-Sept et de mettre en danger la sécurité de l’approvisionnement. Les chefs d’Etat et de gouvernement européens, qui doivent se retrouver à Prague, jeudi 6 et vendredi 7 octobre, ne manqueront pas d’y revenir. « Face aux menaces communes (…), nous ne pouvons pas nous diviser en fonction de la marge de manœuvre de nos budgets nationaux », déclarait le président du conseil italien démissionnaire Mario Draghi, dès le 30 septembre.
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