Le Parlement européen a voté, le 14 septembre, un projet de révision de la directive sur les énergies renouvelables qui lui était soumis par la Commission européenne. L’enjeu était de renforcer les objectifs de déploiement des énergies renouvelables, en lien avec les nouvelles ambitions de l’Union européenne en matière de carburants renouvelables d’origine non biologique (l’hydrogène et ses dérivés).
Le problème est qu’un amendement permettant d’estampiller « renouvelable » l’hydrogène produit à partir d’électricité qui ne le serait pas nécessairement a été adopté par le Parlement… Outre la tromperie que cela constituerait pour le consommateur, cela génère une triple bombe à retardement : climatique, financière et industrielle.
Cet amendement étend à un trimestre l’écart temporel maximal entre la production d’électricité renouvelable et la production d’hydrogène par électrolyse de l’eau. Ainsi, il rend possible le fait de qualifier de « renouvelable » de l’hydrogène produit en l’absence de vent ou de soleil si, à un moment dans le trimestre, de l’électricité éolienne ou solaire a été injectée sur le réseau. Comme l’électricité se stocke mal, ce n’est pas nécessairement de l’électricité renouvelable que consommera en pratique l’électrolyseur, mais bien l’électricité disponible à ce moment, potentiellement produite par d’autres moyens, notamment fossiles (charbon ou gaz).
Adapter la charge
Ce dispositif permettrait donc de qualifier de « renouvelable » de l’hydrogène dont l’empreinte carbone pourrait être jusqu’à 50 % supérieure à celle de l’hydrogène produit par les procédés actuels de vaporeformage de gaz fossile. Cela ôtera à l’hydrogène sa pertinence pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre… ce qui est pourtant son intérêt premier.
Pour produire de l’hydrogène vraiment « renouvelable » à partir d’énergie solaire ou éolienne, il faut ne faire fonctionner les électrolyseurs que lorsque le réseau reçoit l’énergie renouvelable avec laquelle on souhaite les alimenter. Cela oblige à adapter la charge et la puissance des électrolyseurs à la production renouvelable, et réduit leur taux d’utilisation, se traduisant par des coûts de production de l’hydrogène plus élevés.
En permettant aux électrolyseurs de fonctionner sans avoir à tenir compte des fluctuations de la production renouvelable, l’amendement supprime cette contrainte. Cependant, il ne sera pas possible dans la durée de surestimer ainsi les volumes d’hydrogène renouvelable produits et de sous-estimer les coûts de cette production. En effet, si à terme on se passe réellement des combustibles fossiles, les électrolyseurs devront nécessairement suivre les fluctuations de la production renouvelable : ils produiront donc moins d’hydrogène qu’initialement, et pour plus cher.
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