Comme chacun sait, prendre de l’âge est synonyme de déclin en matière de performance sportive. Si la perte de capacité des tâches isométriques est bien renseignée par la science, les explications sont moins connues concernant les tâches dynamiques. Une récente revue tente d’apporter des pistes de réponses à cette question.
Lorsque l’on prend de l’âge, on se fatigue généralement plus facilement lors d’un effort physiquephysique. Au cours du processus de vieillissement, des multiples changements globaux s’opèrent. Dans la question qui nous intéresse, les changements d’intérêts sont ceux qui se déroulent au sein du système neuromusculaire (perte de massemasse musculaire, augmentation du tissu adipeuxtissu adipeux, perte de neurones moteurs, délais plus longs pour la transmission des potentiels d’actionspotentiels d’actions, réduction des afférences sensorielles, réduction du volumevolume des aires motrices dans le cerveau, etc.).
Toutes ces modifications structurelles et fonctionnelles conduisent généralement à une altération des capacités contractiles de la personne âgée, ce qui, en dernier recours, impacte sa vie de tous les jours. Il est donc important de comprendre les tenants et les aboutissants de ces changements afin de les retarder. Une récente revue de littérature publiée dans le Journal of Applied Physiology explore cette question de la perte de capacité avec l’âge.
Comment mesurer la perte de capacité ?
Le marqueur le plus largement utilisé dans les études qui tentent d’élucider les mystères qui gravitent autour de la perte de capacité liée à l’âge est la fatigabilité définie comme suit : « La baisse d’une mesure objective des performances due à une réduction de la force (couple, puissance) dépendante de l’activité en sortie du neurone indépendamment de si la tâche peut être bien réalisée ». Étant donné les écarts de performance pouvant exister entre différents groupes d’individus, la fatigabilité est généralement exprimée en pourcentage de réduction par rapport à une performance initiale.
On sait également que la fatigabilité n’est pas univoque. Elle dépend de plusieurs facteurs (le groupe musculaire impliqué, le type de contraction, l’intensité de la tâche, la continuité ou l’intermittence de l’effort, les critères de mesures retenus, etc.) qui peuvent la faire varier. Dès lors, on comprend aisément que c’est une véritable difficulté de dresser des conclusions générales à propos des pertes de capacités lors du vieillissement et de leurs explications scientifiques.
Les différents types de contractions
Pour la suite de l’article, il est important de se familiariser avec les différents types de contraction musculaire. On distingue deux grandes modes de contractions musculaires : les contractions dynamiques (lors desquelles la taille du muscle varie) et les contractions isométriquesisométriques (lors desquelles la taille du muscle reste constante).
Le mode dynamique englobe deux sous-types de contraction qui nous apportent plus de détails : la contraction concentrique (le muscle se raccourcit) et la contraction excentrique (le muscle s’allonge). Enfin, au sein de ces deux grands modes, se retrouvent encore deux autres sous-types de contraction qui nous informent sur la variation de la force appliquée et de la vitessevitesse du mouvementmouvement lors d’une tâche motrice : la contraction isotonique (la force appliquée reste constante) et la contraction isocinétique (la vitesse du mouvement reste constante).
Jusqu’à présent, la littérature étudiant la fatigabilité chez les sujets âgés s’est principalement intéressée aux contractions isométriques et a laissé de côté les efforts plus dynamiques qui nécessitent du mouvement et donc une mobilisation particulière du système articulaire et tendineux. De fait, les tâches dynamiques sont également plus représentatives des efforts que nous faisons dans la vie quotidienne. Il semble donc urgent de mieux comprendre les interactions entre l’âge et la fatigabilité lors des tâches dynamiques pour développer des interventions ciblées visant à atténuer les détériorations fonctionnelles et la mobilité chez la personne âgée.
Que savons-nous sur la fatigabilité lors des tâches dynamiques ?
Dans la littérature actuelle, plusieurs points font consensus comme le fait que, lors des contractions concentriques, les personnes âgées sont moins fortes, plus lentes et, par conséquent, moins puissantes que les jeunes. On sait que ces baisses de performances sont dues en partie à des propriétés intrinsèques au système neuromusculaire (altérations au sein de la chaîne de myosine, à une plus grande proportion de motoneurones de type lent et de l’atrophie des fibres musculairesfibres musculaires de type 2) et extrinsèques à ce dernier (diminution de la rigiditérigidité tendineuse, altération de l’activation des fibres musculaires, variabilité de la contraction du muscle supra épineux). Comment cela se traduit-il lors de tâches dynamiques isotoniques et isocinétiques ?
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La fatigabilité lors des tâches isocinétiques
Les résultats actuels concernant les tâches isocinétiques sont contradictoires, c’est-à-dire que certains travaux suggèrent des différences de fatigabilité lors de ces tâches entre les personnes jeunes et âgées tandis que d’autres non. Dans certaines études, les auteurs pointent du doigt la vélocité angulaire comme cause principale de la plus grande fatigabilité des personnes âgées, notamment dans les exercices d’extension du genou, moins dans les tâches qui requièrent l’utilisation des dorsifléchisseurs du pied. L’ensemble de ces résultats remet en question l’hypothèse généralement acceptée qu’il existerait une perte universelle de la vitesse lors du vieillissement.
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La fatigabilité lors des tâches isotoniques
En revanche, les résultats portant sur les tâches isotoniques sont unanimes : les personnes âgées sont moins fortes que les personnes jeunes lorsqu’il faut déployer une force maximale constante en tenant compte de paramètres divers comme le groupe musculaire engagé, la diversité des mouvements réalisés ou encore l’intensité de l’exercice. Néanmoins, en réalisant des tâches isotoniques et isocinétiques chez les mêmes groupes, certains auteurs constatent que la vitesse angulaire de mouvement altère la capacité à déployer de la puissance. En d’autres termes, cela suggère que, lorsque le système neuromusculaire devient plus « lent », cela peut prédisposer les personnes âgées à plus de fatigabilité lors de tâches qui demandent beaucoup de rapidité.
Les mécanismes potentiellement impliqués
Comme nous l’avons déjà évoqué, de nombreux changements s’opèrent au sein du système neuromusculaire pendant le vieillissement et des altérations du système nerveux centralsystème nerveux central comme périphérique peuvent être à l’origine de la baisse de performance. Pourtant, peu d’hypothèses font encore consensus dans la littérature car les résultats sont inconsistants : baisse de la volonté d’initier une action, modification dans l’excitation des sarcomères, récupération musculaire plus lente, altération électrique au sein des cellules contractiles, tétanie musculaire prolongée, accumulation de phosphate inorganique, de radicaux libresradicaux libres, changements ioniques, altération des capacités oxydatives, etc.
Pour nombre d’entre elles, ces hypothèses ne sont soutenues que par des associations statistiques sans que les mécanismes cellulaires et moléculaires soient réellement identifiés. À ce jour, d’autres travaux sont donc nécessaires pour développer et valider de nouvelles approches pour améliorer notre compréhension de la fatigabilité durant les tâches dynamiques.