C’est le grand retour sur la Lune ! Initié en 2019 par l’ancien vice-président américain Mike Pence, le programme Artemis de la Nasa a pour but d’y faire revenir des astronautes, comme lors des missions Apollo, il y a plus de 50 ans. Artemis est toutefois plus ambitieux. Le but est de se servir des missions lunaires pour préparer le vol habité vers Mars. Avant tout cela, il faut tester les nouveaux moyens de navigation : le vaisseau spatial Orion et la fusée lunaire SLS. C’est la mission Artemis I qui a débuté le mercredi 16 novembre. Voici son déroulé.
Article initialement publié en mars 2022. Mis à jour le 17 novembre 2022, après le lancement réussi d’Artemis I.
Mars 2022, c’était la première fois que le lanceurlanceur SLS (Space Launch System) se montrait tout entier au public de Cap CanaveralCap Canaveral. Accompagné par la Pleine LunePleine Lune, le SLS domine le site de lancement historique en se dirigeant lentement vers le pas de tir 39B. Il rappelle aux observateurs et à toute une génération le chemin que parcourait la Saturn V vers ce même pas de tir avant d’envoyer des astronautes sur la LuneLune. C’est une étape clé pour la Nasa qui a réussi le roulage de la fusée lunaire SLS. Quid de la suite ?
Revivez le décollage du SLS enregistré en direct le 16 novembre. © Futura
Le SLS arrivé sur son pas de tir, et maintenant ?
Il a fallu vérifier que le SLS s’adapte bien à son pas de tir. La Nasa avait prévu une répétition générale au début du mois d’avril. Elle a finalement eu lieu le 20 juin et a notamment inclus le test de remplissage des réservoirs du SLS. Pour décoller, la fuséefusée lunaire consommera de l’oxygèneoxygène et de l’hydrogènehydrogène à l’état liquideliquide. Si les réservoirs ont déjà été testés au préalable jusqu’à l’explosion, il s’agit là de vérifier que tout fonctionne bien dans les conditions du compte à rebours du lancement.
Une fois la répétition générale passée (et pas tout à fait complète), la Nasa a communiqué une première date de décollage le 29 août comme on s’y attendait. Il n’y a personne à bord du vaisseau spatial OrionOrion qui a été posé au sommet de ce lanceur titanesque. Artemis I est une mission de qualification, à la fois du vaisseau fabriqué en Europe et aux États-Unis, et aussi du SLS produit par Boeing. Si la mission est un succès, les astronautes d’Artemis II prendront le relais.
« Nous sommes prêts ! »
Le pas de tir 39B du centre spatial Kennedy a connu Apollo 10, la navette spatiale américaine, le lancement de la station spatialestation spatiale Skylab, ou encore la mission de paix Apollo-Soyouz. Il a été rénové et renforcé pour pouvoir soutenir un poids équivalent à 2.125 éléphants d’Afrique ! Il est suffisamment robuste pour accueillir les 2.628 tonnes de la fusée lunaire SLS. Cette dernière ne jouera un rôle dans la mission que pendant une heure cinquante-trois minutes. Le reste de la mission concerne le vaisseau Orion et durera près de 25 jours.
Le décollage a été plusieurs fois reporté depuis la date du 29 août. En cause, des soucis de fuite d’hydrogène, un capteurcapteur défaillant, et la menace d’un ouraganouragan. Finalement, le décollage tant attendu a eu lieu le 16 novembre.
À T-0, le lancement commence par la mise à feufeu des quatre moteurs RS-25 ainsi que des deux gigantesques propulseurspropulseurs d’appoint à carburant solide fournis par Northrop Grumman. Ils sont éjectés deux minutes plus tard, complètement vidés de leur carburant. Les moteurs RS-25 continuent de rugir encore six minutes et quatorze secondes. À ce stade, l’étage principal du SLS, reconnaissable par sa couleurcouleur rouge, a terminé son travail et nous sommes déjà à plus de 150 kilomètres d’altitude, donc dans l’espace.
Deux minutes après le largage de l’étage principal, le vaisseau Orion déploie ses panneaux solaires. Il aura déjà été débarrassé de ses panneaux de protection ainsi que de la tour de sauvetage, ce dispositif indispensable pour éjecter le vaisseau et ses occupants dans le cas où la fusée prend feu sur le pas de tir ou en traversant l’atmosphèreatmosphère.
Ce n’est que bien plus tard, 54 minutes après le début du lancement, que débute la propulsion du second étage, l’ICPS, fourni par la United launch Alliance (ULA). L’ICPS sert une première fois pour prendre de l’altitude et une seconde fois une demi-heure plus tard pour injecter le vaisseau Orion sur une orbite de transfert vers la Lune. Une fois sa mission terminée, l’ICPS est largué. On en profite alors pour éjecter une dizaine de CubeSatsCubeSats qui sont des passagers secondaires de ce vol.
Autour de la Lune
Le vaisseau Orion n’en est pas à son premier vol de démonstration. Il a déjà fait un premier vol en 2014, dans le cadre du programme ConstellationConstellation, précurseur du programme Artemis. Ce vol lui permettra de tester une fois de plus le module habité, fabriqué par Lockheed Martin, ainsi que le module de service fourni par l’Agence spatiale européenne (ESAESA). La trajectoire que réalisera Orion pendant la mission Artemis I est équivalente à celle de la mission ApolloApollo 8.
Il faudra un peu plus de trois jours pour atteindre la Lune. Pour s’insérer en orbite, Orion va passer à près de 100 kilomètres de la surface et utilisera la gravitégravité lunaire pour augmenter sa vitessevitesse. Avec l’aide de quelques corrections, le vaisseau se mettra alors en orbite rétrograde autour de la Lune à près de 70 000 km d’altitude. En effet, le vaisseau tournera autour de la Lune dans le sens opposé à sa révolution autour de la Terre. Il y restera plusieurs jours en orbite.
La Nasa en profitera pour récupérer des données, tester les différents systèmes de communication et de navigation du vaisseau. Pour communiquer avec Orion, la Nasa utilisera le Deep Space Network, réseau d’antennes utilisé pour interagir avec les sondes interplanétaires.
Le vaisseau hébergera une expérience (Mare) dont le but est de mesurer le niveau de radiations auxquelles les occupants du vaisseau pourraient être exposés. Autour de la Lune, nous ne sommes quasiment plus protégés par le champ magnétique terrestrechamp magnétique terrestre qui dévie les particules éjectées par le SoleilSoleil. À bord du vaisseau, trois mannequins seront recouverts de capteurs et l’un d’eux portera un gilet expérimental censé bloquer une partie du rayonnement.
Retour sur Terre et suite du programme
Pour quitter l’orbite lunaire et rejoindre la Terre, Orion passera à nouveau à près de 100 kilomètres d’altitude pour s’accélérer, utilisera non seulement la gravité lunaire pour le faire mais aussi le moteur principal du module de service. Il se placera alors sur une orbite de transfert en direction de notre Planète. Le voyage devrait durer un peu plus de trois jours.
C’est au bout d’un voyage de trois semaines couvrant plus de 1,3 million de kilomètres que le vaisseau Orion regagnera la Terre. Avant de pénétrer l’atmosphère terrestre, le module habitable se séparera du module de service. Ce dernier n’est pas protégé, il brûlera dans l’atmosphère pendant sa chute tandis que le module habitable la traversera, protégé par son bouclier thermique. Il terminera sa descente sous parachuteparachute. Il est censé amerrir dans l’océan Pacifique au large de la Californie. La mission Artemis I sera alors terminée.
Il faudra être patient pour la suite, en fonction des résultats de cette première mission. Artemis II ne devrait pas avoir lieu avant 2023, voire 2024. Ce sera la première mission du programme avec des astronautes à bord mais ils ne se poseront pas sur la Lune. Ils en feront juste le tour en mode « répétition générale », comme c’était le cas avec Apollo 10. C’est la mission Artemis III qui fera revenir les astronautes à la surface de notre satellite naturel, y compris la première marche lunaire d’une femme de l’Histoire.