Une nouvelle étude vient de détecter une communication intentionnelle chez les « hocheurs », aussi surnommés singes « pain à cacheter » : lorsqu’un prédateur arrive, les femelles exécutent un cri d’alarme spécifique, visant à alerter les mâles pour défendre le groupe. Un comportement jamais observé chez une autre espèce que l’humain, jusqu’à aujourd’hui.
Au même titre que nous crierions « à l’aide » en cas de danger, ces singes femelles sont capables de lancer un cri d’alerte bien précis lorsqu’un prédateur est aperçu. C’est ce que montre une étude récente publiée dans Animal Behavior Cognition, qui s’est penchée sur les hocheurs, aussi appelés singes « pain à cacheter » ou « blancs-nez ». Ces primates, caractérisés notamment par une tache blanche sur leur nez, d’où leur surnom, se trouvent principalement dans l’ouest du continent africain.
L’équipe de scientifiques a entrepris de tester 13 groupes de hocheurs à l’état sauvage. « Les singes blancs-nez vivent principalement dans les arbres et vivent en groupes d’environ 5 à 25 membres », explique le Dr Claudia Stephan dans un communiqué, biologiste et première autrice de l’étude. « Le mâle reste généralement à la périphérie du groupe et participe à peine à l’interaction sociale. » Pour chacun, un chercheur s’est déguisé avec une peau de léopard et a approché le groupe. L’idée étant d’imiter la venue d’un prédateur. Les femelles ont alors effectué un cri d’alarme, servant à alerter les mâles en retrait. « Afin de prouver que les femelles recrutent délibérément le mâle dans le but de défendre le groupe, nous avons diffusé des enregistrements des cris d’alarme des mâles après l’apparition du léopard, continue Claudia Stephan. Nous voulions montrer que les femelles réagissent directement aux actions du mâle pour protéger le groupe et pas seulement à leurs appels. »
Actuellement, on ne connaît pas l’origine de l’intentionnalité dans le langage humain
Et l’équipe a constaté que ce cri s’adaptait au comportement des mâles, trahissant une communication intentionnelle. Plus précisément, les femelles vérifient l’effet de leur comportement, donc de leur alerte, et l’adaptent ensuite selon si l’objectif est atteint ou non. Une véritable première dans le règne animal, car si ce comportement existe bien sûr chez l’être humain, il n’avait jamais été observé chez d’autres espèces. « Jusqu’à présent, nous n’avions eu aucune preuve concluante que l’intentionnalité de ce type se retrouve également dans la communication vocale animale », confirme Claudia Stephan. Cette découverte pourrait permettre de remonter jusqu’aux racines évolutives de l’intentionnalité du langage humain, qui demeurent pour le moment inconnues.