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La théorie Mond explique mieux les amas ouverts d’étoiles que la gravitation de Newton



Plus on étudie les galaxies, plus une alternative à l’existence des particules de matière noire devient crédible alors que ces dernières échappent toujours sur Terre aux détecteurs de plus en plus performants pour sa chasse. La théorie Mond, qui modifie les lois de la gravitation, vient ainsi de marquer de nouveaux points avec les amas ouverts d’étoiles de la Voie lactée étudiés par la mission Gaia.

Le modèle cosmologique standard avec matière noire et énergie noire dont l’un des principaux pionniers a été le prix Nobel de physique James Peebles a été spectaculairement vérifié par les analyses des observations du rayonnement fossile effectuées par le satellite Planck. Il existe d’autres prédictions de ce modèle qui sont bien corroborées, comme aurait dit le philosophe des sciences Karl Popper, par d’autres observations. Mais tout n’est pas parfait et un petit nombre d’anomalies, comme celle découverte depuis quelques années avec les estimations divergentes de la constante de Hubble-Lemaître qui traduit l’expansion accélérée du cosmos observable, laisse penser qu’une nouvelle physique est peut-être à l’œuvre, expliquant ces anomalies.

Sans remettre en cause la théorie du Big Bang dans ses grandes lignes, il faudrait peut-être, par exemple, remplacer les effets des hypothétiques particules de matière noire par une modification des lois de la mécanique céleste de Newton, et finalement par une modification des lois de la théorie relativiste de la gravitation proposée par Einstein il y a un peu plus d’un siècle maintenant.

De fait, au début des années 1980, le physicien israélien Mordehai Milgrom avait proposé la théorie qui a été baptisée du nom de Mond, acronyme de Modified newtonian dynamics en anglais, ce qui peut se traduire en français par théorie de la dynamique newtonienne modifiée.

La théorie a rencontré de plus en plus de succès ces dernières années en ce qui concerne le monde de la dynamique des étoiles dans les galaxies et elle est peut-être sur le point d’être fortement soutenue par les observations en cours du télescope James-Webb concernant des galaxies observées entre 250 et 500 millions d’années seulement après le Big Bang.

En 2016, Stacy McGaugh donnait cette conférence sur les raisons qui ont poussé des chercheurs comme lui à se tourner vers la théorie Mond proposée au début des années 1980 par physicien israélien Mordehai Milgrom. Stacy McGaugh était un fervent partisan de l’existence de particules de matière noire au début de sa carrière et c’est donc à reculons, en constatant des contradictions entre les prédictions issues de la théorie de la matière noire dans le monde des galaxies et, au contraire, les succès rencontrés naturellement par le cadre général posé par Milgrom modifiant les lois de la mécanique céleste de Newton, que Stacy McGaugh, tel Planck lors de sa découverte de la mécanique quantique, s’est résigné à admettre qu’il fallait changer les lois fondamentales de la gravitation et ne pas introduire de nouvelles particules en astrophysique. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l’écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © TEDx

Des amas de 100 à 1 000 étoiles environ

Toujours est-il qu’aujourd’hui, une équipe internationale d’astronomes menée notamment par Pavel Kroupa de l’université de Bonn en Allemagne, Tereza Jerabkova, maintenant à l’Observatoire européen austral aussi en Allemagne, vient de publier un article dans Monthly Notices of the Royal Astronomical Society (disponible en accès libre sur arXiv) où les chercheurs avancent que la théorie Mond décrit mieux les observations concernant notamment la mission Gaia de l’ESA en ce qui concerne certaines propriétés des amas ouverts d’étoiles dans la Voie lactée.

Rappelons ce que Futura avait déjà expliqué au sujet de ces amas. Il s’agit de concentrations d’étoiles (de 100 à 1 000), situées dans le disque de la Voie lactée. On en connaissait plus d’un millier mais il en restait beaucoup d’autres à découvrir. L’un des plus célèbres amas ouverts est celui des Pléiades (M45). Contrairement aux amas globulaires, comme Messier 9, qui sont âgés de plus de dix milliards d’années, ces amas contiennent de jeunes étoiles. Elles sont nées dans de gigantesques nuages moléculaires situés dans le disque de notre Galaxie, nuages qui se sont effondrés gravitationnellement en se fragmentant pour donner ces étoiles.

Notre Soleil est d’ailleurs né dans l’un de ces amas ouverts. Mais, comme beaucoup d’entre eux sont faiblement liés gravitationnellement, les étoiles se dispersent rapidement dans la Voie lactée, de sorte que la moitié des amas ont un âge inférieur à 200 millions d’années. Certains mettent plus de temps à se dissiper et on estime que moins de 1 % d’entre eux survit pendant deux milliards d’années.

Gaia est une mission qui effectue des mesures de précision quant aux positions et vitesses des étoiles dans la Voie lactée de sorte qu’elle permet de bien définir et étudier les étoiles des amas ouverts. Or, il se trouve qu’une théorie de la gravitation fait des prédictions quand à la déformation des amas ouverts d’étoiles sous l’effet des forces de marée du disque de la Voie lactée.

Des simulations numériques confirmées par la mission Gaia

La théorie de Newton prédit ainsi qu’il doit y avoir des sortes de queues de marée en avant et en arrière d’un amas ouvert, allongées selon l’orbite de l’amas – queues dans lesquelles les étoiles de l’amas s’accumulent au cours de son histoire avant sa « dissolution » finale dans la Galaxie.

La dynamique newtonienne prédit qu’il devrait y avoir en moyenne en gros autant d’étoiles dans la queue arrière que dans le cas avant et que, toujours en moyenne, il existe un temps précis pour qu’un amas se dissipe.

Toutefois, et c’est là que les choses deviennent intéressantes, Mond prédit une asymétrie pour les populations d’étoiles dans les queues de marée. Cette asymétrie peut être évaluée et on trouve qu’un bien plus grand nombre d’étoiles ont tendance à quitter les amas par la queue avant que par la queue arrière.

Selon Kroupa, Jerabkova et leurs collègues, ces prédictions sont parfaitement vérifiées par les analyses des données collectées par Gaia, analyses menées grâce à une nouvelle technique mathématique pour identifier les étoiles appartenant à des amas ouverts spécifiques, développée initialement par Tereza Jerabkova.

En bonus, Mond prédit aussi une durée de vie nettement plus courte pour les amas ouverts que la théorie de Newton, ce qui concorde avec les observations qui continuent de déconcerter les astronomes.

Les chercheurs restent prudents en pointant certaines limitations de leur travail et concèdent qu’il faut encore attendre pour avoir des résultats fermement établis. On peut se souvenir encore que certains modèles de matière noire conduisent aussi à des prédictions qui sont celles de la théorie Mond sans changer les lois fondamentales de la gravitation. Il s’agit des modèles dits de matière noire « floue », fuzzy dark matter ou FDM en anglais.

Le saviez-vous ?

Les amas globulaires, que l’on ne doit pas confondre avec les amas ouverts, sont des concentrations sphéroïdales très denses, de quelques centaines de milliers d’étoiles en moyenne, qui se sont formées dans les premiers milliards d’années de l’histoire de l’univers observable. L’un des plus célèbres est l’amas d’Hercule (M13), vers qui le fameux message d’Arecibo a été envoyé en 1974.

Dans le cas de la Voie lactée, on en connaît plus de 150 mais il est probable qu’il en existe dix à vingt fois plus. Leurs tailles sont comprises entre plusieurs dizaines et plusieurs centaines d’années-lumière et ils se situent sur des orbites elliptiques tout autour de notre Galaxie, répartis de façon isotrope autour du bulbe central et dans le halo.

C’est grâce aux amas globulaires que l’astronome Harlow Shapley a pu déterminer la taille de la Voie lactée et la position qu’y occupait le Soleil. Il lui fallut quatre années de travail à partir de 1914 pour arriver à son but. Cependant, la structure exacte de notre Galaxie, que l’on savait tout de même être un disque, restait alors indéterminée. Heureusement, quelques décennies plus tard, la découverte de la fameuse raie à 21 cm de l’hydrogène atomique neutre a permis à Oort et ses collègues de lever en partie le voile sur la structure de la Voie lactée. Il est apparu qu’elle possédait des bras spiraux à l’instar de certaines galaxies spirales découvertes et identifiées comme des « univers-îles » semblables au nôtre depuis les travaux de Hubble.

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