Une étude chinoise rapporte que l’exposition à l’éclairage artificiel de nuit est associée à un mauvais contrôle de la glycémie et à un risque accru de diabète.
La vie de la plupart des organismes, y compris les humains, est régie par des rythmes circadiens qui se sont développés en réponse au cycle jour-nuit de la Terre.
Ces rythmes, qui correspondent en gros à notre cycle éveil-sommeil, créent des fenêtres de temps optimales pour l’activité, l’apport en nourriture et le repos : durant le jour, notre métabolisme extrait l’énergie contenue dans les aliments pour subvenir aux besoins de la journée, tandis que durant la nuit, l’énergie excédentaire stockée sous forme de glycogène et de graisses sert à assurer le fonctionnement des organes vitaux pendant la période de jeûne.
C’est un peu l’équivalent de quarts de travail dans une usine : les différentes enzymes et hormones métaboliques actives durant le jour sont au repos durant la nuit, alors qu’à l’inverse, celles qui entrent en action durant la nuit deviennent inactives pendant le jour.
Cycles perturbés
Cette chorégraphie moléculaire peut évidemment être grandement perturbée par l’éclairage artificiel de nuit.
Nous aimons beaucoup l’éclairage de nuit (on prévoit installer cet hiver un demi-million de lumières au centre-ville de Montréal !), mais il est indéniable que cette lumière artificielle a des impacts sur nos rythmes circadiens.
La production de la mélatonine par la glande pinéale, essentielle pour favoriser le sommeil, est évidemment en tête de liste des cibles de la pollution lumineuse, mais il ne faut pas non plus négliger l’impact métabolique qui découle des perturbations des rythmes circadiens.
Par exemple, une méta-analyse de 12 études qui se sont penchées sur cette question a rapporté qu’une exposition élevée à l’éclairage artificiel de nuit était associée à une hausse de 13 % du risque d’embonpoint et de 22 % du risque d’obésité1.
Puisque plus de 80 % de la population mondiale est exposée à la pollution lumineuse2, il est donc possible que ces perturbations puissent être responsables d’une proportion non négligeable des désordres métaboliques observés actuellement.
Hausse du risque de diabète
Une étude récente suggère que le diabète de type 2 pourrait représenter un autre effet métabolique indésirable de l’éclairage artificiel3.
Dans cette étude, les chercheurs ont mesuré les taux de glucose sanguin et d’hémoglobine glyquée (un marqueur d’hyperglycémie chronique) de 98 658 personnes réparties dans 162 villes de Chine.
En parallèle, ils ont déterminé l’exposition des volontaires à la lumière artificielle de nuit en utilisant les données satellites du US Defense Meteorological Satellite Program, ce qui leur a permis de séparer la cohorte en cinq quintiles d’exposition (groupes de 20 %, du plus faible au plus élevé).
L’étude a révélé que les zones ayant les plus forts niveaux d’éclairage artificiel (le quintile le plus élevé) avaient une prévalence de diabète augmentée de 28 % comparativement au quintile le plus faible.
L’exposition chronique à l’éclairage artificiel était associée à une hausse de la glycémie, de la résistance à l’insuline et au diabète de type 2, même après avoir tenu compte d’autres facteurs qui auraient pu influencer cette association.
Les chercheurs estiment que 9 millions de cas de diabète de type 2 sont directement attribuables à l’exposition à la pollution lumineuse, un nombre qui risque d’augmenter encore plus au cours des prochaines années en raison de l’urbanisation croissante de la société chinoise.
La pollution lumineuse est un problème négligé dans nos sociétés modernes, elle est pourtant une source d’importants problèmes de santé, autant au niveau de la perturbation des cycles de vie des animaux, que de la santé humaine.
1. Lai KY et coll. (2020) Exposure to light at night (LAN) and risk of obesity: A systematic review and meta-analysis of observational studies. Environ. Res. 2020; 187:109637.
2. Falchi F et coll. The new world atlas of artificial night sky brightness. Sci. Adv. 2016 ; 2 : e1600377.
3. Zheng R et coll. Outdoor light at night in relation to glucose homoeostasis and diabetes in Chinese adults: a national and cross-sectional study of 98,658 participants from 162 study sites. Diabetologia, publié le 14 novembre 2022.