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Très énergivore, le jeu vidéo veut aussi se mettre à la sobriété



De la conception à la réalisation, plusieurs paramètres sont à prendre en compte pour mesurer l’empreinte carbone des jeux vidéo. Actions concrètes ou pure communication? Les studios tentent d’agir.

Alors que l’enjeu du moment est de se mettre à la sobriété, l’univers du jeu vidéo tente faire sa part. Le chercheur américain Ben Abraham explique dans son livre Digital Games After Climate Change (Editions Palgrave Macmillan) comment l’industrie du jeu peut réduire son empreinte carbone. Il observe que des actions sont menées par les studios, mais l’ampleur de la tâche est immense.

Repris dans Ars Technica, Ben Abraham estime qu'”il faudra une mobilisation globale à l’échelle de l’industrie”. Chaque année, la consommation d’électricité des appareils de jeux eux-mêmes est estimée à 34 térawattheures d’énergie, soit l’équivalent en CO2 de 5 millions de voitures.

Evaluer son empreinte carbone, une première étape

Pour Frédéric Bordages, fondateur de Green IT, il est techniquement faisable pour un studio d’évaluer son empreinte carbone, même indirecte. Pour cela, “le studio doit réaliser une analyse de cycle de vie à travers quatre indicateurs principaux: l’épuisement des ressources (les métaux puis les énergies fossiles), l’impact sur les radiations ionisantes et sa contribution au réchauffement global” explique-t-il à Tech&Co. Ces indicateurs ont été repris dans une étude sur les impacts environnementaux du numérique, réalisée par Green IT pour l’Ademe et l’Arcep.

Tout comme nos téléphones, les consoles de jeux vidéo nécessitent l’extraction de matériaux rares, à l’empreinte carbone désastreuse. Par exemple, Ben Abraham souligne que la puce de la PlayStation 4 qui gère presque toutes les fonctions informatiques de la console est composée de 17 éléments différents dont le cadmium, particulièrement toxique.

L’autre impact écologique que les entreprises peuvent évaluer sont les déplacements des salariés des entreprises de jeux vidéo. Le plus urgent serait simplement de réduire ou de supprimer les déplacements des employés, selon Ben Abraham. L’annulation d’événements physiques comme l’E3 cette année, et son remplacement partiel par des événements virtuels, apporte son lot de changements.

Réelles actions ou greenwashing?

Les grandes firmes du jeu tentent de prendre des dispositions. La PS5 est moins polluante que la PlayStation 4. En mode veille, la PS5 ne consommerait pas plus de 0,5 watt comme l’exige la Commission européenne, contre 8,5 watts pour le PS4. Par ailleurs, l’entreprise s’engage à économiser 29 tonnes de CO2 d’ici 2030 en misant sur des technologies moins gourmandes en énergie.

De son côté, Microsoft utilise 100 % d’énergie renouvelable, et s’engage à compenser ou à récupérer tous les gaz à effet de serre qu’elle émet. “De grands éditeurs comme Ubisoft et Nintendo tirent aussi la majorité de leur énergie de sources renouvelables”, indique Ars Technica. Mais pour Frédéric Bordages, les studios ne mettent pas assez les moyens “alors même qu’ils ont pris conscience de l’enjeu écologique”.

Début septembre, plus de 90 studios et personnes travaillant dans le jeu vidéo ont signé une tribune publiée sur le site spécialisé dans l’actualité environnementale, Bon Pote. Ils alertent sur l’impact écologique du métavers et s’engagent à ne pas s’investir dans celui. Dans la mesure du possible, ils comptent favoriser des projets “raisonnés”.

Des actions concrètes

Très concrètement, les studios peuvent activer trois leviers: réduire leur impact en tant qu’organisation, choisir le support de distribution le plus adapté (physique ou téléchargement), s’adapter au matériel des joueurs pour éviter qu’ils ne changent de consoles tous les deux ou trois ans car les jeux nécessitent du matériel de plus en plus performant.

Le studio Space Ape Games collecte les données des joueurs pour estimer les émissions de carbone en nombre d’heures de jeu afin de les compenser au sein même de l’entreprise. En 2018, au niveau mondial, l’entreprise comptait 181 tonnes de CO2 à compenser soit à peu près le total des émissions annuelles d’une douzaine d’Américains moyens.

En France, le distributeur Metaboli, maison mère de Gamesplanet.com, propose des jeux sur PC en téléchargement. L’entreprise travaille actuellement à la mise en place de solutions à la fois pour informer les joueurs et proposer des jeux adaptés. “Les jeux recquièrent du matériel adapté, et choisir un jeu en fonction de l’ordinateur que l’on possède est fondamental”, explique Pierre Forest, le fondateur de Metaboli, interrogé par Tech&Co. Concrètement, Metaboli va proposer pour chacun de ses jeux, un outil qui permet au joueur de connaitre le type de matériel le plus adapté. A partir de cela, Metaboli pourra estimer l’impact environnemental de l’utilisation des jeux de son catalogue.

Pour calculer cette estimation, plusieurs critères sont pris en compte: la RAM, le CPU, le GPU, le disque, l’écran et la box internet. A la sortie, comme pour des appareils électroniques, les jeux obtiendront un score entre A et E.

Le deuxième objectif est d’inciter les studios de jeux à agir. Sur son catalogue, Metaboli compte 500 jeux qui contiennent de près ou de loin du contenu lié à l’environnement. L’idée est de développer un certain “softpower écologique à travers les jeux vidéo”, défend Pierre Forest.

Jouer écolo

Frédéric Bordages souligne le fait que l’utilisation des jeux représente la plus grande part des émissions. Le comportement des joueurs, les habitudes d’utilisation et les différents réglages des consoles peuvent avoir une incidence.

Privilégier les jeux sur mobile apparaît comme une fausse bonne idée. “Les jeux sur mobiles ne viennent pas remplacer mais s’additionner à des heures de jeux en plus de celles passées sur console”, explique le fondateur de Green IT. C’est la même mécanique en ce qui concerne le cloud gaming. Surtout, les données ne sont pas communiquées en assez grand nombre pour mener une étude à ce sujet.

Si les joueurs commencent à tenir compte des émissions de carbone dans leurs décisions, Ben Abraham pense qu’ils se concentreront davantage sur les valeurs ESG des entreprises comme les politiques écologiques mises en place.

Pour cela, des studios s’associent à des initiatives comme Playing for the Planet, qui a pour objectif de réduire l’empreinte carbone de cette industrie.

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Written by Germain

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