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« En Chine, la qualité, la quantité et la répartition de l’eau sont extrêmement problématiques »


Un réservoir d’eau à sec le long du fleuve Yangtzé, dans la province du Zhejiang (Chine) pendant une vague de chaleur, le 20 août 2022.

Genevieve Donnellon-May, étudiante en master à l’université d’Oxford, est experte des questions relatives à l’eau et à la sécurité alimentaire en Chine. Elle contribue régulièrement à plusieurs revues, dont The Diplomat.

La Chine a connu cet été une sécheresse exceptionnelle dans le bassin du fleuve Yangtsé. En quoi ce phénomène local concerne-t-il l’ensemble du pays ?

L’eau pose à la Chine des problèmes importants et liés entre eux : la quantité de l’eau (la Chine ne détient que 6 % des réserves d’eau mondiales), mais aussi sa qualité et sa répartition sont extrêmement problématiques. Ainsi, on estime que le nord du pays, à la fois très peuplé et très agricole, compte 25 % de la population, 27 % du produit intérieur brut, mais ne dispose que de 4 % des ressources d’eau du pays.

Le nord de la Chine est aussi dépendant des nappes phréatiques, qui y fournissent 50 % des besoins de l’industrie en eau, 33 % de l’eau d’irrigation et 65 % de l’eau à usage domestique. Mais cette exploitation des nappes phréatiques a entraîné une baisse importante des niveaux d’eau dans les aquifères de tout le pays. L’aquifère du nord de la Chine est l’un des plus surexploités au monde. En raison de l’agriculture intensive et du développement de l’irrigation, une grande partie de l’aquifère peu profond a diminué de vingt mètres ces dernières décennies, voire de quarante mètres par endroits.

Vous évoquiez un problème de qualité de l’eau…

Oui, les ressources en eau existantes sont très polluées. Une étude menée par le gouvernement chinois en 2016 indique que 80 % des eaux souterraines sont contaminées par des polluants, y compris des métaux lourds ou de l’arsenic.

Pour combler le déficit d’eau dans le nord du pays, Mao voulait y transférer une partie de l’eau venant du sud. Ce projet a-t-il été réalisé ?

Mao avait déclaré : « Le Sud a beaucoup d’eau, le Nord, beaucoup moins. Le Nord devrait en emprunter un peu. » La Chine a donc entrepris de construire un mégaprojet : le projet de diversion sud-nord de l’eau. Pour ce faire, il emprunte trois routes. La route de l’est transfère de l’eau du Jiangsu au Shandong et à Tianjin, à travers le Grand Canal qui relie Hangzhou à Pékin depuis près de 2 500 ans. La route centrale part du Hubei et apporte l’eau à Pékin et Tianjin. Elle fonctionne depuis 2014. Reste à construire la route de l’ouest, pour laquelle il y a un plan officiel, mais aussi des alternatives.

Lire notre reportage : Article réservé à nos abonnés Quand la Chine inverse le cours de ses fleuves

Le plan officiel, qui prévoit de relier le Yangtsé au fleuve Jaune via le plateau Qinghai-Tibet, détournerait 17 milliards de mètres cubes d’eau par an. C’est massif, mais moindre que les alternatives. La première évoque la construction d’un barrage au Tibet qui permettrait de détourner chaque année 200 milliards de mètres cubes d’eau du Sichuan pour l’apporter à Pékin. Mais cela ne semble ni faisable ni nécessaire. Une autre option, semi-officielle, émise en 2017 par une équipe de l’université Tsinghua, fait beaucoup parler : elle consiste à détourner chaque année 60 milliards de mètres cubes d’eau des fleuves du plateau Qinghai-Tibet, y compris trois fleuves internationaux, le Mékong, le Salouen et le Brahmapoutre, pour l’apporter dans le nord-ouest de la Chine, notamment au Xinjiang.

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Written by Stephanie

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