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les fermes collectives, un modèle qui séduit les néopaysans


Dans la pièce de vie commune, les objectifs ont été tracés au marqueur sur un grand tableau blanc : « renouveler les générations », « sortir du surendettement », « rendre le métier non sacrificiel », « relocaliser »… La petite dizaine de paysans de la ferme collective La Clef des sables y jette, de temps à autre, un coup d’œil, comme un rappel régulier à la « raison d’être » de cette exploitation atypique située à Saint-Lattier, en Isère. Au commencement de l’histoire, un seul agriculteur qui, au seuil de la retraite, cherche un successeur pour ses 50 hectares de noyers, d’asperges et de grandes cultures. A ce moment-là justement, le vétérinaire du coin, Nicolas Gohier, pas encore 40 ans, envisage de troquer sa casquette de soignant. Il le rejoint comme salarié en 2019, puis se positionne comme repreneur.

Pour ce néopaysan pourtant, « pas question de poursuivre seul » l’aventure agricole : elle sera collective, pour en alléger la charge et combattre l’isolement. Il impulse alors le projet de La Clef des sables, que rejoignent trois maraîchers, une productrice de plantes aromatiques, un boulanger meunier et, bientôt, une éleveuse fromagère. Dans cette ferme pensée sur un modèle agroécologique, le matériel est partagé. L’achat des bâtiments et de terres supplémentaires – une partie reste en location – est mutualisé grâce à une société coopérative d’intérêt collectif. Les parts sont détenues par les paysans, mais aussi par des proches ou des habitants du coin. « Cela permet d’éviter que les agriculteurs soient seuls à prendre les risques financiers de la subsistance alimentaire », souligne Nicolas Gohier.

Une manière de repenser le rapport à la propriété et au travail de la terre, à l’heure où le métier n’attire plus suffisamment et où un agriculteur sur deux prendra sa retraite d’ici à 2030 sans certitude d’être remplacé. Ici, chaque paysan est responsable de son atelier, mais peut compter sur le collectif pour être relayé sur ses astreintes et s’offrir ainsi de partir en week-end ou en congé. Toutes les semaines, une réunion du collectif permet de notifier ses besoins, notamment en matériel. « Nicolas avait racheté les trois tracteurs de l’exploitation. On les utilise tous un peu, donc on note nos heures d’utilisation et on les rend en travail, par exemple sur le tri des noix », explique Mathieu Denis, 37 ans, venu de l’événementiel et en « stage test d’installation » en maraîchage.

Modèle moins aliénant

A l’image des fermiers isérois, le choix du collectif est une idée qui fait son chemin parmi les jeunes qui souhaitent aujourd’hui se lancer dans l’agriculture. Pour la plupart très diplômés, non issus du milieu agricole et souvent en reconversion professionnelle, ils y voient l’opportunité d’imaginer un modèle moins aliénant et avec davantage de sens. « Je n’ai jamais souhaité m’installer seule, explique Paloma Cuevas, 36 ans, productrice de petits fruits et de raisin de table à La Clef des sables. On a eu tendance à romantiser l’image de l’agriculteur seul dans son champ. Mais le travail agricole est vraiment difficile, physiquement, moralement, financièrement… Etre nombreux aide à ne pas flancher. »

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Written by Stephanie

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